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Premier satellite bengali de communication et premier vol de la Falcon 9 Block 5

mardi, mai 15th, 2018

Le vendredi 11 mai 2018, une Falcon 9 s’élançait depuis Cape Canaveral. Cependant cette dernière était bien différente des versions habituelles : l’interétage est noir, ainsi que les jambes ou encore les grid fins. La raison à toutes ces différences ? Ce lanceur a connu de nouvelles modifications mais ce seront surtout ses dernières évolutions majeures. A bord de ce vol inaugural de la dernière version de la Falcon 9 nommée Block 5, on trouvait le tout premier satellite de communication du Bangladesh : Bangabandhu-1.

 

Décollage de la toute première Falcon 9 Block 5 avec à son bord Bangabandhu-1, vue depuis un drone. Crédits : SpaceX

 

Bangabandhu-1

Ce satellite bengali a deux buts majeurs : améliorer la communication en bande Ku et C en Asie du Sud-Est mais aussi montrer que le Bangladesh sait développer des objets spatiaux. On retrouve cette fierté nationale dans le nom du satellite mais aussi dans la date de lancement initialement prévue.

 

Vue d’artiste du satellite Bangabandhu-1 en orbite et déployé. Crédits : Thales Alenia Space

 

Bangabandhu vient du nom de celui qui est considéré comme le père du Bangladesh : Sheikh Mujibur Rahman surnommé Bangabandhu. C’est grâce à lui et son parti que le Bengladesh a pu devenir indépendant du Pakistan et que le nouveau pays a pu créer sa propre république. Mujibur Rahman est le premier président du Bangladesh puis le second premier ministre et enfin le quatrième président du Bangladesh avant de se faire tuer en 1975 lors d’un coup d’Etat. En hommage à cet homme, élu en 2004 par la BBC comme « plus grand bengali de tous les temps », le premier satellite bengali a été nommé Bangabandhu.

 

Mujibur Rahman, surnommé Banganbandhu, père fondateur du Bangladesh

 

Les bengalis avaient proposé à SpaceX mais aussi à Arianespace de lancer leur satellite. Ils voulaient que ce lancement se fasse le 16 décembre 2017, jour de la fête nationale au Bangladesh en hommage à la reconnaissance de leur indépendance le 16 décembre 1971. Arianespace a répondu en étant très honnête et en leur avouant que le satellite ne pourra jamais être lancé ce jour-ci avec eux. En effet Ariane 5 emporte toujours deux satellites et il n’y avait aucun autre satellite prêt à décoller à cette date. C’est donc SpaceX qui a eu ce contrat mais comme vous pouvez le remarquer le lancement n’a pas eu lieu le à cette date, malheureusement pour le Bangladesh.

 

Séparation entre le satellite et le second étage vu par ce dernier. Crédits : SpaceX

 

Pour améliorer la communication dans l’Asie du Sud-Est, Bangabandu-1 est équipé de pas moins de 26 transpondeurs en bande Ku et 14 en bande C. Le satellite sera placé sur une orbite géostationnaire dans la position de longitude 119,1°. Pour faire simple, si vous alleiz à Balikpapan en Indonésie, Bangabandhu-1 serait situé 36 000km quasiment parfaitement au-dessous de vous. Ce satellite a été désigné et construit en France par Thales Alenia Space et il possède une durée de vie de 15 ans. Cette entreprise française a utilisé la structure Spacebus 4000B2 comme base du satellite. Cette structure accorde aux transpondeurs et autres systèmes de bord une puissance électrique de 6kW. Au total, Bangabandhu-1 pèse 3,7t.

 

Falcon 9 Block 5

D’habitude, le lanceur est toujours une part moins importante d’un lancement car ce n’est que le transporteur. En effet, on peut associer le satellite à une personnalité et la fusée, à sa limousine. En temps normal, la personnalité aura une bien plus grosse part que sa voiture mais pour ce vol c’était tout l’inverse : la voiture était plus importante que le passager.

Effectivement, le lanceur qui a décollé vendredi soir était la toute dernière itération de la Falcon 9 : le Block 5. Chez SpaceX, les Block représentent les différentes versions importantes du lanceur. Ici c’est donc la cinquième version de la Falcon 9 FT. Il est important de préciser Falcon 9 « FT » car il y a également eu des Block 1 et 2 pour la version Falcon 9 v1.1 différents de ceux de la version Falcon 9 FT : il semblerait que SpaceX aime bien embrouiller les spectateurs 😉

 

Décollage de la Falcon 9 Block 5. Crédits : Michael Seeley @mike_seeley avec son autorisation

 

Mais en bref, quelles sont les modifications majeures apportées par cette nouvelle et dernière itération ? Déjà on peut noter plusieurs différences visuelles : l’interétage est noir, les jambes et les grid fins aussi.

Pour l’interétage, cette couleur vient du fait qu’il soit fabriqué en composite carbone (fibres de carbone tissées et prises dans une résine) mais les techniciens ne le peignent pas car cela rajouterait de la masse et des coûts. Le composite carbone permet d’avoir une pièce légère mais qui soit très résistante, que ce soit mécaniquement ou thermiquement parlant.

 

Photo de l’interétage de la Falcon 9 Block 5. Crédits : K.Scott Piel @spiel2001 avec son autorisation

 

Pour les jambes et la base des moteurs, ce noir est causé par une nouvelle protection thermique. En effet, la Falcon 9 Block 5 devrait pouvoir voler une dizaine de fois sans réparation majeure et jusqu’à 300 fois d’après Elon Musk avec des révisions plus importantes. Pour pouvoir réaliser cet objectif de réutilisation rapide et peu coûteuse, il faut que les pièces puissent survivre au mieux à la rentrée atmosphérique et à l’atterrissage. C’est pour ça que les parties les plus sensibles ont ce nouveau revêtement noir. Le reste de l’étage a également une nouvelle protection thermique, mais celle-ci a besoin de résister à des températures plus faibles et le revêtement est donc différent et blanc.

 

Photo rapprochée du lancement. On y voit bien les jambes et la base des moteurs noires. Crédits : John Kraus @johnkrausphotos pour America Space @americaspace avec leur autorisation

 

Les dernières pièces visibles qui ont été modifiées sont les grid fins. Ces surfaces de contrôle qui permettent au premier étage de maîtriser son orientation une fois dans l’atmosphère étaient initialement fabriqués en aluminium et recouvertes avec une peinture blanche qui les protégeaient de la chaleur. Cependant, malgré cette protection, il arrivait que des grid fins soient très abîmés après le vol : Pas très pratique pour de la réutilisation à bas coût. C’est pourquoi les ingénieurs ont décidés de fabriquer ces surfaces de contrôle en titane. Ces pièces sont maintenant beaucoup plus résistantes à la chaleur et leur forme leur permet également d’être plus performante. D’ailleurs, petite anecdote sur ces pièces en titane : saviez-vous que sont les plus grosses pièces jamais moulées d’un coup avec du titane ? C’est déjà le cas depuis quelques lancements, ces grid fins ayant été introduits sur une précédente Falcon 9 Block 4 ou encore sur les deux boosters latéraux de la Falcon Heavy.

 

Photo des grid fins en titane de la Falcon 9 Block 5. Crédits : K.Scott Piel @spiel2001 avec son autorisation

 

Une autre différence bien visible est le fait que le logo de SpaceX ait été remonté sur le premier étage. Cette modification mineure mais amusante permettrait à cette écriture de rester visible malgré la suie déposée sur l’étage après une rentrée. En effet, les moteurs Merlin 1D de la Falcon 9 fonctionnent au kérosène et à l’oxygène liquide et par conséquent relâchent beaucoup de suie. Cette dernière vient se déposer surtout au niveau du réservoir de RP-1 (kérosène pour fusée) car le réservoir d’oxygène liquide, très froid, est recouvert de glace ce qui complexifie l’accroche de la suie. Le fait de remonter le logo au niveau du réservoir d’oxygène liquide assure donc qu’il sera visible sans avoir besoin de laver l’étage.

 

Panorama de très grande résolution de la Falcon 9 Block 5 sur son pas de tir. Crédits : K.Scott Piel @spiel2001 avec son autorisation

 

On a déjà vu que les jambes de la Falcon 9 avaient été modifiées pour mieux résister à la rentrée mais elles ont également connu une autre modification : Les équipes au sol peuvent maintenant les replier très facilement pour le transport. En effet, avant, les équipes au sol devaient détacher les jambes dépliées avant de pouvoir transporter indépendamment les jambes et l’étage jusqu’au hangar de SpaceX. Cette procédure prenait plusieurs heures et était par conséquent un frein à la réutilisation rapide promise par Musk. Avec ces nouvelles jambes, les équipes au sol pourront les replier sans avoir besoin de les enlever et ce beaucoup plus rapidement.

 

Ancienne procédure pour retirer les jambes d’atterrissage. Crédits : Universe Today

 

Les moteurs Merlin 1D ont également été améliorés. Leur poussée a été augmentée de 10% et les neufs moteurs du premier étage sont maintenant identiques, alors qu’avant, seul le moteur central et deux moteurs latéraux pouvaient se rallumer. Les turbopompes ont également été modifiées. En effet ces pompes, qui sont chargées d’acheminer à haute pression les carburants jusqu’à la chambre à combustion, sont mises en rotation par des turbines. Cependant les techniciens avaient remarqué des microfissures sur ces dernières et la NASA a donc exigé de SpaceX que ces turbines soient modifiées avant que la Falcon 9 ne puisse emporter des hommes dans l’espace pour éviter tout accident d’une turbine qui exploserait en vol.

 

Test d’allumage d’un moteur Merlin 1D au centre de SpaceX à McGregor au Texas. Crédits : SpaceX

 

La structure « octaweb » qui tient les neufs moteurs du premier étage ensemble a également été modifiée. Maintenant elle sera boulonnée au reste de l’étage au lieu d’être soudée. Cela simplifiera les procédures d’inspection et de remises à neuf mais permettra aussi d’installer les systèmes de séparation des boosters plus facilement pour transformer une Falcon 9 en Falcon Heavy plus rapidement. Cette « octaweb » a également été renforcée de manière à ce que chaque moteur soit isolé. Ainsi si un moteur explosait en vol, les autres ne seraient pas touchés et la fusée pourrait continuer son voyage.

 

Structure « octaweb » avant l’installation des neufs moteurs. Crédits : SpaceX

 

La dernière modification majeure est une totale refonte des COPV. Les COPV (pour Composite Overwrapped Pressure Vessel) sont des petits réservoirs souvent remplis d’hélium qui servent à pressuriser les réservoirs d’une fusée pour éviter que celle-ci ne se fasse écraser par l’accélération des moteurs. Ce sont ces réservoirs qui ont été la cause des deux échecs de la Falcon 9 (lors du test statique d’Amos-6 et du lancement de CRS7). SpaceX a donc entièrement redéveloppé ses COPV pour que ces problèmes ne surviennent plus.

 

On voit ici l’intérieur du réservoir d’oxygène liquide d’un Falcon 9. On aperçoit les anciens COPV qui sont les cylindres noirs sur les côtés. Crédits : SpaceX

 

En somme, la Falcon 9 Block 5 est un condensé de toutes les modifications et de l’expérience qu’a acquis SpaceX lors des 53 vols de ce lanceur. C’est également cette version qui fera voler pour la première fois des astronautes américains sur un vaisseau également américain depuis la mise à la retraite des navettes spatiales en 2011. Cependant, avant de faire voler ses astronautes, la NASA exige que SpaceX réussisse 7 vols consécutifs et ce, sans modification de cette dernière itération. Pourquoi 7 ? Pourquoi est ce que le SLS (le prochain gros lanceur de la NASA) n’a pas besoin de ces 7 vols ? La réponse est simple, la NASA n’a pas accès au plan de la Falcon 9 et se base donc sur les statistiques pour évaluer la fiabilité du lanceur. Le SLS n’aura pas à faire ces vols car il aura été désigné par la NASA pour accueillir des astronautes et respecter leurs propres règles.

Le vol de vendredi s’est déroulé à la perfection et la Flacon 9 Block 5 a montré qu’elle était totalement capable de lancer un satellite puis de venir se poser à 611km au large sur la barge Of Course I Still Love You. Cette nouvelle version est plus performante que jamais et permettra à la NASA d’envoyer en orbite ses astronautes. Pour SpaceX, cela permettra de limiter les coûts car Elon Musk a annoncé qu’ils auront entre 30 et 40 premiers étages en rotation pour leurs lancements. Pour frapper toujours plus fort, Musk a également dit que SpaceX essaiera d’effectuer deux lancements avec le même premier étage en moins de 24h dès l’année prochaine.

 

La première Falcon 9 Block 5 à atterrir sur la barge Of Course I Still Love You (abrégé en OCISLY). Crédits : SpaceX

 

Seul point négatif à noter sur ce lancement, il y a eu un report d’un jour. En effet le lancement était initialement prévu pour jeudi soir mais à T-58sec le compte à rebours a été stoppé et le tir a été reporté. C’est ici l’ordinateur de bord du lanceur qui a décidé de ce « hold » (arrêt dans le compte à rebours). Il faut savoir que la fusée prend le contrôle total de tous les systèmes à T-1min. D’après SpaceX, le problème ici venait d’un capteur du pas de tir qui avait mal été réinitialisé après un test au sol. Au final, la Falcon 9 Block 5 n’a eu aucun problème, ce qui rassure et SpaceX et la NASA !

Comme toujours, si vous souhaitez réagir sur cet article, il vous suffit de vous rendre au topic créé à cet effet !

 

Photo longue exposition du lancement sur laquelle on voit bien la manœuvre du « gravity turn » pour se mettre en orbite. Crédits : Michael Seeley @mike_seeley avec son autorisation

 

Photo prise au moment du Max-Q, phase pendant laquelle le lanceur subit le plus de pression aérodynamique. On voit très bien la condensation liée à cette pression en haut du lanceur. Crédits : Michael Seeley @mike_seeley avec son autorisation

InSight, l’atterrisseur qui écoutera le cœur de Mars

mardi, mai 8th, 2018

Mars, la quatrième planète rocheuse de notre Système Solaire. Elle est toute rouge et a encore bien des secrets. Cependant, elle pourrait nous en apprendre beaucoup sur la formation des autres corps rocheux majeurs comme la Terre ou Vénus. C’est pourquoi des scientifiques envoient en permanence des missions vers la planète rouge. Le samedi 5 mai c’est donc une nouvelle sonde qui est partie à sa rencontre. Cette sonde, ou plutôt cet atterrisseur, c’est Mars InSight.

Assemblage des derniers éléments de l’atterrisseur Mars InSight. Crédits : NASA

 

Mars InSight

Cet atterrisseur a été conçu et fabriqué par la NASA (National Aeronautics and Spatial Administration). Ce dernier est très différent des précédentes missions de l’agence américaine, et notamment sur les six points suivants :

-InSight est la première mission à explorer les profondeurs de Mars

            -InSight nous en apprendra beaucoup sur l’intérieur des planètes comme la nôtre

            -InSight essaiera pour la première fois de détecter des « tremblements de mars »

            -InSight est la première mission interplanétaire américaine à décoller de la côte Ouest des Etats-Unis

            -InSight nous apprendra comment se sont formés les volcans martiens

            -InSight utilisera le potentiel de « machine à voyager dans le temps » de la planète rouge

InSight, ce n’est pas un vulgaire nom sans histoire, il est l’acronyme de Interior Exploration using Seismic Investigations, Geodesy and Heat Transfer. En plus, en anglais, le mot « insight » signifie « voir la nature propre de quelque chose ».

Comme tout objet qui a pour but de se poser correctement sur Mars, InSight est placé dans une coquille qui le protègera de la rentrée dans l’atmosphère. En effet, il est très dur de se poser sur cette planète à cause de son atmosphère très fine : contrairement à la Terre, il est inconcevable d’atterrir sur Mars avec seulement des parachutes, le frein aérodynamique serait insuffisant, mais dans le même temps, et contrairement à la Lune, la planète rouge possède une atmosphère qui force les ingénieurs à équiper leurs atterrisseurs ou rovers d’une protection thermique. Un juste milieu qui ne nous est donc pas favorable et exige quelques solutions technologiques bien spécifiques.

Photo longue exposition du bâtiment d’assemblage final de l’Atlas V qui se retire en préparation du lancement. Crédits : NASA

En plus de cette protection, InSight possède également un module de croisière qui assure à l’atterrisseur d’arriver à destination. En effet de légères perturbations pendant le voyage (éruption solaire, comète passant proche, défaut sur la sonde, etc) pourraient dévier ce dernier et lui empêcher d’atteindre le point voulu. Ce module de croisière est donc équipé de petits moteurs de contrôle mais aussi de panneaux solaires pour alimenter tous les systèmes nécessaires à la survie du véhicule.

Au total, Mars InSight, son module de rentrée atmosphérique et le module de croisière mesurent 1,76 mètres de haut, 2,64 mètres de diamètre et 3,4 mètres d’envergure avec les panneaux solaires du module de croisière. Cet ensemble est cependant relativement léger avec une masse de seulement 694kg au décollage, répartie de la manière suivante : 358kg pour l’atterrisseur en lui-même, 189kg pour le module de rentrée atmosphérique, 79kg pour le module de croisière et 67kg de carburants. Il manque cependant 27kg par rapport à la masse de charge utile lancée mais nous reviendrons sur cette différence plus loin.

Largage de Mars InSight vu depuis l’étage supérieur Centaur. On voit très bien les panneaux solaires du module de croisière ainsi que la coquille de rentrée. Crédits : ULA

Sur les 358kg d’InSight, seuls 50kg sont des expériences scientifiques. Le reste ne fait que partie de la structure de l’atterrisseur ou des éléments nécessaires au bon fonctionnement de ces dernières. Dans ces éléments on retrouve notamment les panneaux solaires circulaires qui fournissent à la sonde une puissance électrique de 600 voire 700 Watts les jours ensoleillés sur Mars : avec cette puissance, on aurait tout juste assez pour alimenter un Blender. Les jours plus poussiéreux (lors d’une tempête par exemple), les panneaux ne fourniraient plus que 200-300 Watts.

Le programme Mars InSight aura coûté 813,8 millions de dollars aux américains dont 163,4 pour le lancement. De leurs côtés, les français et les allemands qui ont développés deux expériences pour l’atterrisseur, ont investis 180 millions de dollars.

 

Lancement

L’atterrisseur a donc décollé avec succès à 13h05 le 5 mai depuis le pas de tir 13 de la base militaire de Vandenberg en Californie. La fenêtre de tir pour cette mission s’ouvrait le 5 mai et se fermait le 8 juin avec des fenêtres de deux heures chaque jour. C’est une fusée Atlas V 401 qui a été chargée de cette mission. Le numéro 401 n’est pas anodin et apporte les informations suivantes :

            – 4 : Le lanceur AtlasV est équipé d’une coiffe de 4m de diamètre (il existe aussi une coiffe 5m)

            – 0 : Il n’y a aucun booster auxiliaire attaché au premier étage pour ce vol (il peut y en avoir jusqu’à 5)

            – 1 : L’étage supérieur Centaur est équipé d’un seul moteur RL-10 d’Aerojet Rocketdyne (il existe une version du Centaur avec 2 moteurs)

Photo longue exposition montrant la trajectoire qu’a pris l’Atlas V pour se mettre en orbite avant d’envoyer InSight vers Mars. Crédits : NASA

Comme dit précédemment, cette mission était la première mission interplanétaire à décoller de la côte Ouest. En effet, il est plus avantageux de partir de la côte Est car on profite de la rotation de la Terre en partant directement au-dessus de l’océan Atlantique : le lanceur a donc besoin de moins de carburant. Pourquoi donc faire décoller InSight depuis la Californie ? La raison principale est qu’il y avait plus de disponibilités sur le calendrier des lancements à Vandenberg qu’à Cape Canaveral. La NASA a donc décidé de partir depuis l’Ouest des Etats-Unis et de se placer sur une orbite quasi-polaire avant de foncer vers Mars.

L’Atlas V est plutôt familière avec les missions interplanétaires. En effet c’est elle qui a envoyé à destination de la planète rouge l’orbiteur NASA’s Mars Reconnaissance Orbiter en 2005, le rover Curiosity en 2011 ou encore l’orbiteur MAVEN en 2013. Les sondes New Horizons, Juno et OSIRIS-Rex ont été également décollés à bord d’Atlas V respectivement en 2006 à destination de Pluton, en 2011 pour Jupiter et en 2016 vers l’astéroïde Bénou.

 

Voyage de croisière

Mars InSight va maintenant se déplacer dans l’espace interplanétaire avant d’arriver à destination le 26 novembre. Durant cette longue phase de trajet, pas moins de six corrections de trajectoires seront effectuées pour assurer la sonde d’arriver au bon moment et au bon endroit sur la planète rouge. Vous pouvez voir ci-dessous que ces corrections seront effectuées le 15 mai, le 28 Juillet, le 12 octobre, le 11, le 18 et le 25 novembre.

Trajet et corrections de trajectoire pendant le vol de croisière. Crédits : NASA

Pendant ce long voyage, InSight communiquera avec la Terre grâce au système DSN de la NASA (Deep Space Network). Ce dernier est un rassemblement d’antennes en Californie, en Espagne et en Australie. L’ESA (European Space Agency) a également donné son aide en fournissant à la NASA la possibilité d’utiliser certaines de ses antennes en Argentine et en Australie.

Mars InSight pendant son vol de croisière. Crédits : NASA

Les principales activités pendant cette phase de croisière seront la calibration des équipements de l’atterrisseur et des modifications dans l’orientation de la sonde pour que les panneaux solaires soient face au Soleil et que l’antenne pointe la Terre. Contrairement à d’autres sondes martiennes, InSight ne sera pas en rotation constante lors du voyage. Ce dernier utilise donc une centrale inertielle ainsi qu’un traqueur à étoiles et des capteur solaires pour connaître son attitude. Ce sont ensuite quatre moteurs qui assurent le contrôle d’attitude. Ces quatre moteurs ainsi que les quatre propulseurs qui effectuent les corrections de trajectoire se situent sur l’atterrisseur et possèdent donc des tubes d’extension qui sortent en dehors de la coquille de rentrée atmosphérique.

 

Phase EDL

La phase EDL représente la phase finale du vol d’InSight. EDL est l’acronyme de Entry, Descent and Landing. Le trajet a été prévu d’une manière à ce que la date du décollage n’impacte pas la date de la phase EDL. Peu importe le jour du lancement, l’atterrissage se fera le 26 novembre. Comme vous pouvez le voir ci-dessous, InSight utilisera, dans un premier temps, seulement son bouclier thermique pour ralentir. Pendant cette phase, la décélaration sera au maximum de 75,5 m/s² soit 7,4G. Une fois la vitesse suffisamment faible, un parachute supersonique sera déployé. Ce dernier permettra à l’atterrisseur de ralentir davantage. Le bouclier thermique pourra donc être largué, puis InSight se détachera de la coquille et utilisera douze rétrofusées pour se poser à 2,5m/s sur la surface martienne.

Evènements pendant la phase EDL. Crédits : NASA

Cette phase EDL est très similaire à celle de l’atterrisseur Phoenix lancé en 2008. Les différences entre les deux se retrouvent sur les points suivants :

            -InSight rentrera plus vite dans l’atmosphère : 5,9km/s contre 5,6km/s

            -InSight aura plus de masse au moment de la rentrée : 608kg contre 573kg

            -InSight atterrira 1,5km plus haut que Phoenix ce qui lui laisse moins d’atmosphère pour freiner

            -InSight atterrira durant une saison martienne plus propice à la formation de tempêtes

Cependant InSight a connu quelques modifications grâce à l’expérience acquise avec Phoenix comme un bouclier thermique plus épais pour résister aux éventuelles tempêtes, un parachute qui s’ouvrira à une vitesse plus élevée et des cordes qui tiennent le parachute, plus résistantes.

Pendant cette phase EDL, InSight communiquera avec l’orbiteur Mars Reconnaissance Orbiter qui relaiera les données à la Terre avec le système DSN. Les cubesats MarCO A et B lancés en même temps qu’InSight serviront également de démonstrateurs technologiques en essayant de relayer ces données mais nous reparlerons d’eux plus loin, ils en valent la peine.

InSight devrait atterrir sur la partie ouest de Elysium Planitia, aux coordonnées 4,5°N 135,9°E. La zone d’atterrissage est une ellipse de 130km de long et 27km de large. L’atterrisseur a 99% de chances de se poser dedans. Ce site a été choisi au travers de 21 autres ellipses suivant de critères scientifiques mais aussi techniques car il faut que la sonde ait le plus de chance de réussir son atterrissage.

Zone d’atterrissage de Mars InSight photographiée par l’orbiteur Mars Odyssey. Crédits : NASA

 

 

Lieux d’atterrissages des différents atterrisseurs et rovers américains. Crédits : NASA

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Expériences

On trouve à bord d’InSight quatre expériences principales : SEIS, HP3, RISE et APSS. Ce sont grâce à ces dernières que nous pourrons en apprendre plus sur Mars mais aussi indirectement sur notre planète bleue.

Expériences placées sur Mars InSight. Crédits : NASA

 

SEIS : L’expérience Seismic Experiment for Interior Strcuture est un sismographe composé de six capteurs de deux types différents. Chaque groupe de trois capteurs sera disposés sur un axe différent pour pouvoir capter une onde sismique peu importe sa direction. Le premier type de capteurs sera placé dans un environnement sans air et aura pour but de mesurer des ondes de faible fréquences (de quelques Hertz à un centième de Hertz). Les autres capteurs permettront de mesurer des fréquences plus élevées (jusqu’à 50Hz).

Vue en coupe de l’expérience SEIS. Crédits : NASA

SEIS sera placé directement sur la surface de Mars par le bras robotique qu’emporte Mars InSight : ce bras sera d’ailleurs le premier bras robotique utilisé sur un autre corps que la Terre.  Une fois les capteurs posés sur le sol, le bras viendra rajouter par-dessus une protection ressemblant à une sorte de cloche, afin de limiter l’impact de la chaleur mais aussi du vent.

Cette expérience mesurera les « tremblements de mars » (Marsquakes en anglais en référence à Earthquakes pour les séismes sur Terre). Cependant, les sismographes de SEIS pourront aussi détecter l’influence gravitationnelle de la Lune Phobos mais aussi des impacts de météorites : les scientifiques pensent en enregistrer entre une douzaine et une centaine.

C’est le CNES (Centre National d’Etudes Spatiales) qui a dirigé le développement de SEIS mais ce sont des équipes du monde entier qui ont participé à sa construction.

 

HP3 : L’expérience Heat Flow and Physical Properties Probe est constitué de deux éléments principaux : une foreuse qui creusera un trou de 5m de profondeur et une sonde thermique qui mesurera les modifications de chaleur. Cette dernière nous donnera pour la première fois des données sur la quantité de chaleur qui s’échappe de l’intérieur de la planète.

Vue détaillée de l’instrument HP3. Crédits : NASA

Cette chaleur qui s’évade est très importante car elle permet aux géologues de déterminer la composition interne de la planète mais aussi son mode de fonctionnement. Pour Mars, ces données nous permettraient d’élaborer avec plus de précisions l’évolution de la planète rouge au cours des âges.

La foreuse de HP3 est équipée d’un mécanisme qui va frapper le sol à plusieurs reprises pour le percer. Pour ce faire, un bloc de tungsten est placé au bout d’un ressort et ce sont jusqu’à 20 000 coups et 40 jours qui seront nécessaires pour atteindre la profondeur de 5m. Au-dessus de ce mécanisme, il y a plusieurs capteurs thermiques pour mesurer la température à différentes profondeurs mais aussi la conductivité thermique des roches martiennes.

Comme pour SEIS, HP3 sera déposé sur la surface martienne par le bras robotique d’InSight. La foreuse fera une pause de 4 jours tous les 15cm creusés pour éviter une surchauffe des mécanismes.

C’est la DLR (Deutsches Zentrum für Luft und Raumfahrt ou Centre de l’aérospatiale allemande) qui a développé et construit cet instrument. Le chef de projet, Tilman Spohn, s’est fortement inspiré d’un des outils placés sur l’atterrisseur Philae (sur lequel il a travaillé) pour créer HP3.

 

RISE : RISE pour Rotation and Interior Structure Experiment aura pour objectif de mesurer les perturbations dans l’inclinaison de l’axe de rotation de Mars. Pour ce faire, pas besoin de matériels particuliers : RISE utilisera simplement le signal radio de communication avec la Terre pour effectuer ses mesures.

Il existe deux types de perturbations : la précession et la nutation. Le premier peut être montré facilement avec une toupie. Lorsque la toupie commence à pencher, son axe de rotation tourne autour du point de contact. Pour Mars ce phénomène prend environ 165 000 ans.

Le phénomène que cherche à mesurer RISE est donc plutôt celui de nutation. Une bonne analogie à celui-ci est le moyen de savoir si un œuf est cuit ou non : En le faisant tourner sur lui-même. Si le centre est solide, la rotation n’est pas perturbée, si le centre est liquide, on observe des perturbations. Pour Mars, ces nutations prennent environ un an et seront donc mesurables par RISE. Pour les mesurer, il suffit de regarder le mouvement d’InSight et suivant celui-ci, on pourra déduire des nutations.

A partir de ces données on pourra affiner nos estimations de la taille et de la densité du cœur de Mars mais pour les rendre encore plus précises, il faudrait une mission encore plus longue. Cependant on ne peut pas confier ce genre d’expériences à des rovers car leur mouvement permanent ne permettrait pas de mesurer les nutations.

Ce sont les antennes radio en bande X de Mars Insight qui communiqueront avec les énormes paraboles de DSN qui permettront ces mesures. Le scientifique William Folkner du JPL de la NASA a été le chef de projet pour RISE car il avait déjà travaillé sur une expérience équivalente en 1997 avec Mars’ Pathfinder.

 

APSS : La dernière expérience qu’emporte InSight est nommée APSS pour Auxiliary Payload Sensor Subsystem. Cette dernière est un regroupement de plusieurs capteurs qui vont étudier l’environnement martien. Cette étude va aller du champ magnétique local (en effet Mars n’a pas de champ magnétique globale comme la Terre mais il existe des champs locaux) à celle des vents en passant par la température et la pression.

La raison principale d’avoir installé APSS est de pouvoir déterminer si les données du sismographe SEIS ne sont pas influencés par le champ magnétique ou les vents. Cependant APSS servira également en tant que véritable expérience pour améliorer notre connaissance de l’environnement martien.

Le magnétomètre d’InSight sera le tout premier instrument de ce genre à être posé sur Mars. Cet instrument permettra d’en apprendre plus sur les variations de ces champs magnétiques locaux, comme de savoir s’ils seraient modifiés par des interactions entre les vents solaires et l’ionosphère de Mars. Il permettra également de mesurer les effets sur le cœur métallique de ces champs et donc d’en apprendre encore plus sur celui-ci.

C’est l’Université de Californie qui a fourni ce magnétomètre comme elle l’avait fait pour d’autre missions de la NASA (Galileo par exemple).

Les instruments TWINS (Temperature and Winds for InSight) vont mesurer la température, la direction et la vitesse des vents. Pour ce faire, des bras extensibles vont se déployer de part et d’autre de l’atterrisseur avec à leur bout un thermomètre et un instrument capable de mesurer le mouvement de l’air dans trois directions.

C’est le centre d’astrobiologie de Madrid qui a proposé ces instruments. La NASA a ensuite simplement repris des pièces de rechange qu’ils avaient d’une station météo du rover Curiosity pour réaliser TWINS.

 

Etant donné que l’atterrisseur sera positionné dans l’hémisphère nord, les instruments SEIS et HP3 seront placés au Sud de celui-ci pour qu’il ne soit jamais dans son ombre. C’est d’ailleurs cette zone que regarderont en priorité les caméras de Mars InSight.

Mars InSight déposera également sur la surface de la planète rouge des réflecteurs nommés LaRRI. Ceux-ci mesurent seulement 5cm de diamètre et sont équipés de groupes de trois miroirs placés à angle droit. Ces groupes de miroirs permettent de réflechir un laser dans la direction dont il provient. L’agence spatiale italienne a fourni ces réflecteurs pour qu’ils puissent être utilisés par une future mission martienne pour se poser très précisément grâce à un altimètre à laser.

Un des réflecteurs LaRRI. Crédits : NASA

 

MarCO

L’étage Centaur de l’Atlas V emportait également deux petits CubeSats construits et développés par le JPL : MarCO A et B pour Mars Cube One. Cependant les équipes qui les ont développés préfèrent les appeler Eve et Wall-E en référence aux personnages du dessin-animé de Pixar. Ces deux petits satellites 6U (30cmx20cmx10cm) ont pour but de démontrer la possibilité de créer un réseau de relais avec des CubeSats.

Vue détaillée des cubesats MarCOs. Crédits : NASA

Pour tester ceci, MarCO A et B ont été envoyés en même temps qu’InSight et ils devraient servir de relais pendant la phase EDL. L’atterrisseur communiquera en bande UHF avec ces cubesats qui retransmettront les données en bande X à la Terre. Ces cubesats deviennent ainsi, par la même occasion, les premiers à quitter l’orbite terrestre !

Rôle de relai des MarCOs. Crédits : NASA

 

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Si vous êtes intéressés de savoir comment s’est passée la rédaction de cet article, vous pouvez retrouver un timelapse juste ici !

 

L’Europe s’équipe d’une nouvelle force de surveillance des ressources terrestres

samedi, avril 28th, 2018

Connaissez-vous Copernicus ? Il n’est pas ici question de l’astronome prussien qui a démocratisé l’idée de l’héliocentrisme mais plutôt d’un programme de l’agence spatiale européenne : l’ESA. Cette dernière a développé Copernicus dans un but de surveillance de notre Terre que ce soit au niveau des forêts, des océans ou même de la pollution de l’air. Pour réaliser cette surveillance, le programme s’appuie sur la constellation des satellites Sentinel. Le 25 avril 2018, c’est justement Sentinel-3B qui a été mis en orbite par la petite fusée russe Rokot.

 

Copernicus

Logo de Copernicus : un projet européen qui date de la fin du XXème siècle

Avant d’entrer dans le vif du sujet, il est important de revenir un peu sur l’histoire et les objectifs de Copernicus. Le 19 mai 1998, les institutions qui s’occupaient du spatial européen décide de créer GMES pour « Global Monitoring for Environmental Security » qui se transformera l’année suivante en « Global Monitoring for Environment and Security ». La différence entre les deux est subtile mais elle est belle est bien présente. Là où l’acronyme de 1998 montrait un objectif de protection de l’environnement, celui de 1999 montre que la surveillance de celui-ci a également des implications sur la sécurité.

En 2004, la Commission Européenne (CE) signe un accord avec l’ESA pour développer le segment spatial qui sera essentiel à GMES. En 2007, GMES est reconnu comme une initiative phare de l’Union Européenne par la Communication sur la politique spatiale européenne. En 2009, la CE propose une base légale et un financement pour GMES sous le nom du règlement sur « le programme européen d’observation de la terre (GMES) et sa mise en œuvre initiale (2011-2013) ». Ce dernier entre officiellement en vigueur l’année suivante.

Différentes familles des satellites Sentinel. Crédits : ESA

En 2013, le programme est renommé Copernicus et un premier budget est alloué après l’approbation par le Parlement européen du MFF (cadre financier pluriannuel) pour la période 2014-2020. Ce budget de 3 786 millions d’euros répartis en fonction du PIB des états participants, permettra l’exploitation des trois premiers satellites nécessaires à Copernicus : Sentinel-1A, 2A et 3A ; les précurseurs de la constellation éponyme.

Le but du programme Copernicus est d’assurer l’autonomie de l’Europe dans la surveillance de la Terre à toutes échelles. Cette surveillance servira d’appui aux directives votées par l’UE (Union Européenne) mais aussi pour ses engagements internationaux. En effet, avant de décider de modifier les lois sur l’exploitation des forêts, il est préférable de savoir à quoi ressemble déjà les forêts européennes.

Carte du monde établie par Sentinel 3A. On y voit la variation du niveau des océans pendant le mois de mars 2016. Crédits : ESA

Aujourd’hui, Copernicus traite six domaines :

  • Surveillance des terres
  • Surveillance du milieu marin
  • Surveillance de l’atmosphère
  • Gestion des urgences
  • Sécurité
  • Adaptation au changement climatique

Ce nombre de domaine augmentera au fur et à mesure que la constellation Sentinel se développera.

 

Sentinel

Depuis le début de cet article, nous parlons des satellites Sentinel, mais qu’est-ce donc que ce regroupement ? Sentinel a pour but, comme son nom l’indique parfaitement, de servir de sentinelle pour le programme Copernicus. Ce sont ces satellites qui vont observer la Terre depuis l’espace et fournir la majorité des informations pour Copernicus. C’est en 2008 qu’un accord entre la CE et l’ESA décide que cette dernière devra développer l’infrastructure spatiale nécessaire à GMES. La constellation Sentinel est composé actuellement de sept satellites, et d’ici 2021 ce nombre devrait s’élever à onze. Cependant, Sentinel ce n’est pas que des satellites entiers. On retrouve également dans la liste trois instruments qui seront simplement implantés sur d’autres objets spatiaux.

 

Certains des satellites Sentinel sont identiques mais on distingue quand même différentes familles

– Sentinel 1 : Les satellites Sentinel 1 sont au nombre de 3 : Le 1A a été lancé comme premier du segment orbital de Copernicus en juin 2014, puis 1B l’a rejoint en avril 2016 et 1C devrait être lancé en 2021. Cette première famille de Sentinel est équipée de radar qui permettent d’imager la Terre avec une résolution de 10m par pixel peu importe la météo ou l’heure locale. Ces satellites pèsent 2,3 tonnes au décollage et sont placés sur une orbite héliosynchrone de 693km d’altitude et 93° d’inclinaison par une fusée Soyuz lancée depuis Kourou. Ils ont une durée de vie minimale de 7 ans et demi et mesurent 3,4m de haut et 1,3m de côté.

Un satellite Sentinel 1. Crédits : ESA

 

– Sentinel 2 : Si vous vous baladiez dans l’espace sur une orbite héliosynchrone de 786km d’altitude inclinée à 98,5°, vous pourriez croiser deux satellites de cette famille : 2A lancé en juin 2015 et 2B lancé en mars 2017. Ces deux jumeaux seront rejoints en 2021 par leur nouveau frère 2C. Bien plus léger que leurs cousins de la première famille (1,2 tonnes), les Sentinel 2 décollent de Kourou à bord d’une fusée Vega. Cette partie de la constellation image les océans terrestres dans treize bandes spectrales différentes et avec une résolution de 10 à 60m. Avec deux satellites, il est théoriquement possible d’imager toute la Terre en cinq jours mais à cause des nuages, Sentinel 2 ne peut assurer une image propre de tout le globe que en un mois.

Un satellite Sentinel 2. Crédits : ESA

 

– Sentinel 3 : Encore une famille de triplets. Sentinel 3A et 3B sont déjà en orbite respectivement lancés en février 2016 et en avril 2018. Ils attendent également leur frère qui devrait partir pour l’espace en 2021. Ces satellites placés sur une orbite héliosynchrone de 814km d’altitude et inclinée à 98,6° ont pour but de récolter un maximum d’informations sur nos beaux océans bleutés. Parmi ces données, on retrouve la hauteur des vagues, la vitesse des vents, la température et la couleur des océans. Avec ces données on peut par exemple observer le changement climatique mais aussi repérer où est concentrée la vie végétale avec la photosynthèse qui résultera d’une modification de la couleur perçue. Ces satellites Sentinel 3 pèsent chacun 1,2 tonnes et mesurent 3,7m de long pour 2,2m de côté. C’est la fusée russe Rokot qui s’occupe du transport de ces derniers jusqu’à l’orbite. Les Sentinel 3 ont une durée de vie minimal de 7 ans et demi mais celle-ci devrait pouvoir être étendue jusqu’à 12 ans.

 

Un satellite Sentinel 3. Crédits : ESA

 

– Sentinel 4 : La famille Sentinel 4 n’est constitué que de deux instruments 4A et 4B qui seront installés respectivement sur les satellites Météosat de 3ème génération : MTG-SG-A 1 et 2. Ces instruments, prochainement lancés en 2021 et 2029, auront pour mission l’étude de la composition de l’atmosphère terrestre. Ils seront à terme situés sur une orbite géostationnaire à 36 000km du plancher des vaches.

Deux satellites Météosat de 3ème génération qui porteront Sentinel 4A et 4B. Crédits : ESA

 

– Sentinel 5 : Sentinel 5 représente la première famille mixte. On y trouve un satellite (5P) et un instrument (5A). Comme la famille précédente, les Sentinel 5P et 5A analyseront l’atmosphère. Normalement, ce groupe n’aurait dû être constitué que d’instruments mais cet envoi ne pouvait se faire avant 2021 car aucun satellite MetOp-SG ne devait être envoyé avant et ce sont ceux-ci qui doivent porter Sentinel 5. L’ESA a donc décidé la fabrication d’un petit satellite pour pouvoir exploiter cette famille à partir de 2017. C’est ainsi qu’en octobre 2017, le satellite Sentinel 5P (pour Precursor) décolle à bord d’une fusée Rokot. Ce dernier ne pèse que 820 kg et a été placé sur une orbite héliosynchrone de 824km d’altitude et 98,7° d’inclinaison. Sa durée de vie est estimée à 7 ans.

Le satellite Sentinel 5 Precursor. Crédits : ESA

 

– Sentinel 6 : Cette famille ne comporte qu’un seul satellite au double nom : Sentinel 6A ou Jason CS. Celui-ci devra poursuivre la mission de Jason, constellation américano-européenne de satellites lancés en 2001, 2008 et 2016. Leur but (et donc celui de Sentinel 6A) sera de mesurer la topographie des océans. Sentinel 6 devrait être lancé en 2021 et servira de transition entre le système Jason qui appartenait aussi à la NASA et un système radar 100% européen mais dont la technologie ne sera testée qu’en 2019 avec le satellite SWOT (Surface Water Ocean Topography).

 

Le satellite Sentinel 6A / Jason CS. Crédits : ESA

 

Le 25 avril 2018, c’est donc le satellite Sentinel-3B qui a décollé à bord de la fusée russe Rokot. Cette dernière mesure 29m de haut pour 2,5m de diamètre. Elle peut placer 1,2 tonnes en orbite héliosynchrone et 1,8 tonnes en orbite basse. Sur 31 lancements de ce lanceur, seuls 3 ont échoués. Petite anecdote en passant, comme beaucoup des petites fusées russes et des premières américaines, Rokot était à la base fait pour devenir un missile balistique intercontinental : un ICBM. A cause de son passé, Rokot est toujours aujourd’hui lancé depuis un tube de lancement, sorte de silo à missiles mais hors du sol. Le lancement s’est déroulé sans accroc et le signal a été établi. Le lendemain du vol, Sentinel-3B a même été catalogué sur une orbite de 803km par 815km inclinée à 98,62°. Le dernier étage du lanceur a lui été capté sur une orbite de 400km par 755km. Ce nouveau satellite européen se trouve donc sur la même orbite que son prédécesseur Sentinel-3A, qu’il suit d’une dizaine de minutes.

 

Pour finir, voici quelques photos du satellite et du lancement :

 

Décollage de Sentinel-3B à bord du lanceur Rokot. On distingue bien le tube de lancement gris. Crédits : ESA

Le satellite Sentinel-3B avant intégration dans la coiffe. Crédits : ESA

Le satellite Sentinel-3B dans la coiffe. On remarque qu’il rentre tout juste. Crédits : ESA

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Trois lancements : Inde, Russie, Chine

dimanche, avril 1st, 2018

Jeudi 29 mars 2018, ce ne sont pas une, ni deux mais bien trois fusées qui ont décollées pour mettre en orbite un total de quatre satellites. Comme si trois lancements n’étaient pas assez en soit, on y a vu deux fusées assez atypiques. Un premier lancement a eu lieu à 13h26 depuis le centre spatial de Satish Dhawan en Inde. Les deux suivants n’ont été espacés que de quelques minutes avec un lancement depuis Plesetsk en Russie à 19h38 et un lancement depuis Xichang en Chine vers 20h (l’agence spatiale chinoise ne communique que très peu sur ses lancements).

 

GSLV F08

Le premier lancement de la journée était donc indien. Le but de cette mission était de placer le satellite GSAT-6A sur une orbite géostationnaire. Pour atteindre ce but, l’ISRO (Organisation de Recherche Spatiale Indienne) a dû sortir les grands moyens en plaçant sur le pas de tir leur deuxième fusée la plus puissante : la GSLV mkII. En plus d’envoyer GSAT-6A, cette mission a permis à l’agence indienne de tester certaines modifications sur le second étage du lanceur.

 

Fusée GSLV mkII au décollage. Crédits : ISRO

 

GSAT-6A est un satellite de communication développé par l’ISRO qui rejoint leur constellation INSAT. Ce satellite construit sur la base I-2K de l’agence indienne va communiquer avec une antenne bande S haute puissance. Il mesure 1,53m de largeur, 1,65m de profondeur et 2,4m de hauteur lorsqu’il n’est pas déployé. En effet GSAT-6A emporte une antenne équipé d’une nouvelle technologie : une antenne dépliable de 6m de diamètre. Ce satellite étant très similaire à GSAT-6 lancé en août 2015, il va également servir de démonstrateur technologique pour plusieurs mécanismes dont cette antenne dépliable. L’antenne bande S devient ainsi la plus grande antenne spatiale jamais envoyé dans l’espace par l’ISRO. C’est cette fréquence qui est utilisée pour transmettre les communications tandis qu’un système d’antennes bande C, dont une antenne déployable de 0,8m, s’occupe de relayer le signal de contrôle des stations au sol. Pesant près de 2,14 tonnes, GSAT-6A produit pas moins de 3 119 watts pour alimenter tous ses systèmes.

 

Satellite GSAT-6A au moment de son encapsulation dans la coiffe du lanceur. Crédits : ISRO

 

La moitié de la masse de GSAT-6A ne représente que du carburant. En effet, le lanceur place le satellite sur une orbite de transfert hautement elliptique et c’est ensuite à ce dernier de réaliser une manœuvre pour atteindre son orbite circulaire finale. Pour ce faire, GSAT-6A possède un moteur principal nommé LAM qui a été certifié pour pouvoir rester allumé pendant 50 minutes sans interruptions et qui atteint un temps maximal cumulé de fonctionnements de plus de 6h30. Cependant ce moteur de 440N de poussée ne devrait pas avoir à rester allumer si longtemps. LAM utilise des carburants hypergoliques (Tetroxide d’azote et dimethilhydrazine) : ces carburants ont la propriété de s’enflammer au moindre contact. Ce type de carburant est très souvent utilisé pour les satellites car il permet des rallumages quasi infinis des moteurs. Sur GSAT-6A, ces mêmes carburants sont utilisés sur 8 petits moteurs de 22N et 8 autres de 10N qui servent principalement au contrôle de l’attitude et au maintien en orbite. Ces plus petits moteurs peuvent rester allumer pendant 2h45 sans interruptions mais encore une fois, ils ne seront jamais utilisés si longtemps. Le point le plus important pour ce type de moteurs est plutôt le nombre de rallumages possibles : Ici on atteint 300 000 cycles. Ces moteurs peuvent également fonctionner en mode pulsatif pour réaliser de très légères corrections. Le temps minimal de ces pulses est de 8ms (8 millièmes de secondes !).

 

GSAT-6A en orbite (vue d’artiste). On note bien l’antenne de 6m dépliée. Crdéits : ISRO

 

En comptant tous ses systèmes et le carburant disponible, la durée de vie prévue de GSAT-6A est de 10 ans. A la fin de cette période, le satellite sera réhaussé sur une orbite dite « cimetière » pour éviter toute collision avec d’autres satellites.

Comme évoqué précédemment, le lanceur GSLV mkII a testé des modifications sur le second étage pendant ce vol. Ces changements sont principalement sur le moteur : L’ISRO a remplacé le moteur Vikas classique par un moteur de nouvelle génération avec plus de poussée. Cette amélioration permet d’augmenter la charge utile maximale en orbite basse de 2,5 tonnes. D’après l’ISRO, ce changement sera affecté aux prochains vols de GSLV mkII dont le vol de Chandryaan-2 qui devrait avoir lieu cette année et viser la Lune avec un orbiteur, un atterrisseur et un petit rover.

 

Intégration du deuxième étage du lanceur GSLV mkII. Crédits : ISRO

Ces modifications ont été testées avec succès et le vol a été un succès. Petit fait amusant, pendant la conférence de presse post-lancement, le porte-parole de l’ISRO a parlé rapidement de leur fusée PSLV-XL en la désignant avec le surnom « sale gosse » en rapport au précédent échec du déploiement de la coiffe l’année dernière. Heureusement, ce sera à GSLV mkII de gérer l’importante mission lunaire qui marquera le premier atterrissage lunaire pour l’Inde !

Malheureusement, trois jours après le lancement, l’ISRO a annoncé qu’ils avaient perdu le contact avec GSAT-6A. Les ingénieurs vont tout tenter pour regagner le contrôle du satellite. Si leurs tentatives sont vaines, cet échec rejoindra celui de l’année dernière sauf que là ce n’est pas le lanceur qui a échoué mais bien le satellite en lui-même.

 

Tableau informatif sur le lanceur GSLV mkII. Crédits : ISRO

Profil de vol de la GSLV mkII. Crédits : ISRO

 

 

VNIIEM EMKA

Plus tard dans la journée, c’est une fusée russe qui décollait depuis le centre spatial de Plesetsk pour emmener le satellite VNIIEM EMKA en orbite. Cette fusée c’est la Soyuz 2.1v qui a effectué son quatrième vol avec succès. EMKA, c’est un satellite expérimental militaire pour le compte du ministère russe de la défense.

 

Décollage de la fusée Soyuz 2.1v. Crédits : Roscomos

 

EMKA, ou autrement nommé Zvezda ou encore Kosmos-2525, aura pour but de tester un nouveau système d’imagerie terrestre. Ce dernier atteindra un rapport résolution / taille assez important. En effet, le satellite ne mesure que 0,9 x 0,7 x 1,4m et pourtant il peut prendre des photos d’une résolution de 0,5m au minimum : cette résolution signifie la longueur d’un côté d’un pixel sur l’image finale. Une telle résolution est aussi permise par l’altitude relativement basse de l’orbite du satellite : 300km. Le capteur permet d’obtenir des images dans le domaine de la lumière visible et donc des couleurs réelles et fidèles à la réalité. Au total, le satellite ne pèse que 250kg et du fait de son statut de démonstrateur a une durée d’environ cinq ans.

 

Satellite EMKA. Crédits : VNIIEM

Etant donné qu’EMKA est un satellite militaire, les seules infos proviennent des publications publiques de VNIIEM, son fabricant, qui sont assez limitées. Dans les faibles informations que nous avons, nous pouvons noter la présence de moteurs K50 et K10,5 qui ont respectivement des poussées de 50N et 10,5N pour garder le satellite sur son orbite mais aussi contrôler son attitude (son orientation). Pour obtenir cette dernière, EMKA est équipé d’un capteur stellaire qui, comme au XVIème siècle en navigation maritime, utilise les étoiles pour se repérer.

 

Ce satellite a été lancé par une fusée Soyuz 2.1v qui peut sembler assez étrange pour tous fans du spatial. En effet, on retrouve l’appellation Soyuz, le haut d’un Soyuz mais en bas il n’y a pas de boosters. En plus ce lanceur est très récent : Son premier vol a eu lieu en décembre 2013. Le but principal du Soyuz 2.1v est de fournir à la Russie un lanceur léger pour remplacer Rokot. Effectivement, ce dernier qui avait été développé pendant l’URSS utilise des pièces de missiles ukrainiens, pays qui n’accepte plus de leur fournir ces pièces. Roscosmos a donc décidé de commander à son constructeur de fusées, TsSKB Progress, de plancher sur une version modifiée du Soyuz. On arrive finalement avec une fusée de 160 tonnes au décollage et qui peut en placer 3 (des tonnes, pas des fusées) en orbite basse.

Profil de vol de la fusée Soyuz 2.1v lors de ce vol. Crédits : Russian Space Web

Cette mission marque donc une nouvelle réussite pour la Russie du spatial et le lanceur Soyuz 2.1v devient de plus en plus fiable (malgré un échec partiel lors du deuxième vol dans lequel le satellite n’a pas voulu se détacher). Ce vol marquait le 27ème vol orbital réussi depuis le début de l’année.

 

BEIDOU 3 M9 & 10

Le dernier lancement de la journée a eu lieu quelques minutes après celui de la Russie. Celui-ci a mis en orbite deux nouveaux satellites du programme de géolocalisation chinois Beidou 3. C’est le lanceur Longue Marche 3B qui a accompli cette mission. Le lancement s’est déroulé parfaitement bien d’après les annonces effectuées par les dirigeants de la CNSA (Administration Spatiale Nationale Chinoise). Si vous souhaitez plus d’informations sur les satellites ou sur le lanceur, vous pouvez en trouver sur l’un de nos précédents articles.

 

Décollage de la fusée Longue Marche 3B. Crédits : CNSA

 

Au final, ce ne sont pas moins de trois fusées qui ont emportées un total de quatre satellites en ce jeudi 29 mars 2018. Cette année pourrait bien marquer un record de lancement car nous sommes déjà à 28 lancements orbitaux à la fin de Mars (et même à 30 si on compte le lancement de SpaceX de Vendredi et le nouveau lancement chinois de Samedi).

 

Sources : ISRO, SpaceFlight101, RussianSpaceWeb, VNIIEM, Roscosmos, CNSA

 

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Deux grandes nouveautés pour SpaceX

mercredi, février 28th, 2018

Vous savez sûrement déjà que SpaceX arrive à récupérer les premiers étages de ses fusées mais saviez-vous que l’agence a de nombreux autres plans ? Le plus gros de leur projet est évidemment la colonisation de Mars mais ce genre de mission coûte extrêmement cher : c’est pour cela que SpaceX cherche à réutiliser un maximum de leurs fusées, pour tenter d’abaisser le coût de l’accès à l’espace. Le 23 février 2018, lors du quatrième vol de la compagnie en 2018, deux nouveautés ont été testées pour simplifier le but ultime de celle-ci. Savez-vous lesquelles ?

Paz, le satellite principal du vol

Vue d’artiste du satellite Paz déployé. Crédits : Hisdesat

Avant de parler de ces deux sujets, il est important de présenter la charge utile principale du vol : le satellite espagnol Paz (qui signifie Paix). Ce satellite est opéré par Hisdesat qui l’a commandé à la société Airbus Defence and Space (Airbus DS). C’est cette compagnie qui s’est chargée de la construction entière du satellite hexagonal de 5m de long et 2,4m de diamètre. Outre Hisdesat, c’est aussi le gouvernement espagnol qui pourra profiter de ce dernier pour assouvir ses besoins en défense et sécurité et les données seront aussi vendues dans un contexte d’utilisation commerciale. L’architecture globale de Paz reprend celle de TerraSAR-X et TanDEM-X : deux satellites utilisés par la DLR (agence spatiale allemande) qui avaient été commandés à Airbus DS.

Séparation du satellite une fois en orbite. Crédits : SpaceX

Le satellite pèse un total de 1341kg à plein dont 59kg de carburant. Il est alimenté en électricité par ses panneaux solaires collés sur une face de Paz pour une surface totale de 5,25m². Une fois cette énergie produite, elle est stockée pour la nuit dans des batteries Li-Ion de 108Ah (pour comparaison, une batterie de smartphone ne contient que 1Ah en moyenne). Le satellite est également équipé de nombreux systèmes pour contrôler son attitude, c’est-à-dire son orientation. Dans ceux-ci, on trouve des micropropulseurs utilisant de l’hydrazine (RCS), des roues à réaction, des magnéto-coupleurs utilisant le champ magnétique terrestre pour s’orienter : un système plutôt complet. A cela s’ajoutent des capteurs stellaires pour détecter l’orientation dans laquelle se trouve Paz, couplé à un GPS et des magnétomètres. Enfin, le satellite est équipé d’un système de régulation thermique qui évite sa dégradation à cause des rayonnements solaires ou du froid spatial. Tous ces systèmes qui sont finalement nécessaires au bon fonctionnement de la charge utile de Paz lui assure une vie d’au moins 7 ans en sachant que la mission devrait en durer 10.

Vues avant et arrière de l’instrument PAZ-SAR. Crédits : Eoportal

Paz a trois objectifs : cartographier la Terre, guider les bateaux et étudier l’atmosphère. C’est l’outil PAZ-SAR qui va s’occuper de la partie imagerie. Cet instrument utilise des ondes radar pour observer notre belle planète quelle qu’en soit la météo et peu importe l’heure. Le fonctionnement d’un tel système est assez simple : dans un premier temps, une antenne (qui est composée de 12 panneaux pour PAZ-SAR) envoie vers la Terre des ondes radar (X-Band) d’une fréquence de 300MHz (votre wifi utilise du 2400MHz ou 5800MHz, à tire d’exemple). Cette première antenne va en quelque sorte éclairer la surface pour qu’une seconde antenne, plus petite, puisse « photographier » la Terre. Si on voulait reproduire cette mécanique avec de la lumière visible, on enverrait un énorme spot lumineux en orbite, ce spot éclairerait la surface et un appareil photo prendrait une image du sol. L’avantage des ondes radar, outre le fait de ne pas gêner les populations, est qu’elles requièrent moins d’énergie pour être produite car leur fréquence est plus faible (un demi-milliard de fois plus faible). Qui plus est, ces ondes radar, si elles sont bien utilisées, peuvent permettre d’observer la surface à travers les nuages et même dans certains cas quelques mètres sous le sol. PAZ-SAR peut ainsi prendre trois types d’images différentes : 10km x 5km avec une résolution de 1m ; une bande de 100km avec une résolution de 15m ; une bande de 30km avec une résolution de 3m. Paz va principalement utiliser le sonde mode d’imagerie appelé SAR (d’où le nom de l’instrument) et compte en prendre plus de 200 par jour.

Ce satellite espagnol sert également de relais aux navires maritimes en faisant parti de la constellation ExactEarth. C’est la charge utile AIS (Système d’Identification Automatique) qui lui permet de remplir cette fonction de guide. En utilisant ce système, Paz deviendra le premier satellite jamais construit qui utilise à la fois le système AIS et le système SAR. En effet, le fait de combiner les deux permet également d’améliorer les données AIS car le radar SAR peut également détecter des bateaux mais au prix d’une difficulté : l’association des données. Effectivement, si le SAR peut détecter les bateaux et mesurer leur vitesse ainsi que leur direction, il aura du mal à identifier le navire en question. Les ingénieurs ont donc dû trouver une solution pour que la combinaison des deux systèmes puisse avoir un effet positif en pouvant assimiler les données SAR aux données AIS.

Pour finir, Paz contient un instrument scientifique nommé ROHPP pour Radio Occultations and Heavy Precipitation with Paz. Le principe de cet outil est d’utiliser les satellites GNSS (GPS, Galileo, Glonass, BeiDou, etc) pour étudier l’atmosphère terrestre. En effet, lorsque les ondes de différents satellites de géo positionnement traversent l’atmosphère, les gouttelettes d’eau vont interférer avec le signal et ainsi le dévier. De cette manière, Paz pourrait recevoir des signaux qu’il n’est pas censé capter. L’outil ROHPP va donc analyser ces données et suivant la position des satellites GNSS, pouvoir déduire le taux d’humidité de l’atmosphère, sa pression et d’autres paramètres. Ces derniers permettent, en nous donnant un meilleur modèle de cette couche d’air protectrice, d’améliorer les prédictions météorologiques et de réduire les probabilités d’erreur. Cette méthode permet donc d’étudier l’atmosphère terrestre à différentes altitudes tout en restant en orbite terrestre. Elle est aujourd’hui de plus en plus utilisée sur les nouveaux satellites et notamment les CubeSats.

Paz a donc plusieurs objectifs qu’il devra effectuer pendant une dizaine d’années depuis son orbite héliosynchrone de 515km. Ce satellite espagnol a également une longue histoire qui a finalement abouti sur un lancement. En effet, Paz aurait dû être lancé en 2013 à bord d’une fusée russe Dnepr. Cependant, cette fusée ne fait quasiment plus de lancements car les missiles desquels elles proviennent nécessitent des pièces ukrainiennes (Dnepr avait commencé son service pendant l’URSS). Hisdesat devait donc trouver un nouveau lanceur et là deux propositions s’offrent à la compagnie : Arianespace avec Soyuz ou SpaceX avec Falcon 9. C’est finalement SpaceX qui l’emporte !

Starlink, deux satellites qui marquent le début d’une aventure

Séparation des deux satellites Tinitin A et B. Crédits : Elon Musk

Paz n’a pas été le seul passager de ce vol car ce sont également deux satellites Starlink qui sont partis : Tintin A et B. La constellation Starlink est un autre projet fou de SpaceX qui vise à placer en orbite pas moins de 12 000 satellites pour fournir un accès Internet haut débit et peu cher dans le monde entier. Cette méga-constellation compterait 4400 satellites sur une orbite de 1 100km et plus de 7000 sur une orbite très basse (300 à 350km d’altitude). Ces deux orbites permettraient à Starlink de fournir un accès constant au sol.

Sur ce vol, ce sont donc les deux premiers prototypes qui ont décollés. Ces unités pèsent environ 400kg chacun et ne sont pas forcément représentatifs des futurs satellites de la constellation. Comme on peux le voir sur l’image ci-contre, Tintin A et B ont été placés de part et d’autre d’un cylindre qui permet de les maintenir jusqu’à leur séparation. Le satellite Paz était positionné juste au-dessus de ce plot.

Tintin A et B de part et d’autre de leur cylindre avant le lancement. Crédits : SpaceX

En effet, SpaceX prévoit d’envoyer la majeure partie de ses satellites Starlink à bord de vols commerciaux. Cela permet de les envoyer sans frais supplémentaires car le vol est payé par le contrat et le fait de rajouter ces objets ne fait que remplir l’espace vide dans la coiffe.

Starlink représente un enjeu très important pour SpaceX. Le but de cet accès internet serait de financer en partie le projet de colonisation martienne de l’agence. SpaceX avance déjà très vite et d’après Elon Musk, leur seule limitation est le financement. Ce « bonus » pourrait donc permettre un voyage vers la planète rouge avant les années 2030, selon les standards calendaires de M. Musk que l’on ne manquera pas de nuancer. Il ne faut pas oublier que les premiers vrais satellites de Starlink ne seront envoyés qu’à partir de l’année prochaine. Pour l’instant peu d’informations sur ce projet sont dévoilées mais on espère en apprendre plus dans quelques mois.

Une coiffe récupérée ?!

Et oui ! SpaceX a accompli un nouveau succès en réussissant à récupérer la coiffe de ce vol. La mission Paz était la première utilisation de la coiffe 2.0 de la Falcon 9, qui a pour but d’être réutilisée. Encore une fois, cette mission aurait un avantage considérable car une coiffe entière coûte près de 6 millions de dollars pour SpaceX. La manière qu’utilise l’agence pour faire ré-atterrir ses coiffes et assez originale et ingénieuse.

A gauche une coiffe 1.0, à droite une coiffe 2.0. La seconde est légèrement plus grande mais surtout réutilisable. Crédits : NASASpaceflight

Des réservoirs d’azote liquide sont placés à l’intérieur de la coiffe. Ces derniers, via des micropropulseurs à l’extérieur, permettent un contrôle de l’attitude pendant la rentrée atmosphérique, comme pour le premier étage. Une fois la rentrée effectuée, un parachute est déployé. Cependant, ce parachute est très différent de ceux utilisés normalement pour des capsules spatiales : il est ici rectangulaire et non pas circulaire, s’apparentant davantage à un parapente. Ce type de voile est notamment utilisée pour les sauts acrobatiques en parachutes depuis un avion. En effet, contrairement à leurs cousins circulaires, les parachutes rectangulaires peuvent être dirigés. Et bien la coiffe 2.0 de SpaceX utilise exactement ce système mais pour aller où ?

La cible des coiffes est le bateau Mr. Steven de SpaceX. Ce bateau de plus de 60m de long est équipé d’un grand filet sur le pont arrière pour amortir l’atterrissage des demi-coiffes. Ce vol du 23 février était donc le premier test de cette récupération.

Bateau Mr. Steven avec son filet à l’arrière. Crédits : Elon Musk

La rentrée atmosphérique s’est très bien passée, le parachute s’est ouvert correctement mais la demi-coiffe s’est posé dans l’eau à quelques centaines de mètres de Mr. Steven. Les techniciens à bord du bateau ont ensuite pu récupérer cette demi-coiffe visiblement en très bonne état et la ramener au port pour des analyses approfondies. L’autre moitié de coiffe quant à elle s’est écrasée plus violemment et a perdu sa forme arrondie pour adopter une forme… plus plate. Il est désormais question d’utiliser un parachute plus grand pour ralentir le vol de la coiffe et garantir une meilleure précision.

Finalement ce nouveau vol de SpaceX est encore une fois un succès total sur sa mission principale et la compagnie a pu tester deux grandes nouveautés : Starlink et la récupération des coiffes. Comme les derniers vols de Falcon 9, le premier étage était ici réutilisé (il avait déjà volé pour Formosat-5) mais n’a pas été récupéré à nouveau. En effet c’est un ancien Block 3 et les nouveaux Block5 entrent dans les dernières phases de test car le premier allumage statique se fera à McGregor dans quelques semaines.

Pour le plaisir des yeux, voici quelques photos relatives au vol ainsi qu’un descriptif des évènements. Et n’oubliez pas, comme d’habitude, pour commenter cet article cela se passe directement sur notre Forum !

 

Pas de tir SLC-4 vu par les satellites Deimos 2. Avec l’autorisation de Deimos Imaging, an UrtheCast Company

Décollage depuis le pas de tir SLC-4E. Crédits : SpaceX

 

Condensation de la vapeur d’eau derrière la fusée à cause de la pression sur celle-ci. Crédits : Spa

Moitié de coiffe retombant derrière le second étage. Crédits : SpaceX

Sources : SpaceX, Elon Musk, Eoportal, NASASpaceflight, FETSpace

Le monde connaît un nouveau géant !

vendredi, février 9th, 2018

SpaceX, la compagnie privée fondée par Elon Musk en 2002, a enfin fait décoller la Falcon Heavy : une fusée surpuissante annoncée depuis 2011 et qui aura su se faire attendre. Ce lanceur que beaucoup résument à trois Falcon 9 accolées les unes aux autres est en fait encore bien plus complexe, incroyable et impressionnante. Au-delà du lanceur, ce qui aura retenu l’attention du public et de la presse, c’est une charge utile des plus curieuse : une voiture, une vraie, la Tesla Roadster personnelle de M. Musk.

Le 6 février 2018, le pas de tir historique 39A du Kennedy Space Center, qui a connu les vols des missions Apollo ainsi que la plupart des décollages de navettes, accueillait le lanceur lourd de SpaceX : la Falcon Heavy. Ce vol inaugural introduisait beaucoup de nouveautés pour cette compagnie comme la gestion des boosters, qui implique une séparation contrôlée pour ne pas endommager l’étage central (ne mentez pas, vous avez déjà entrainé la perte de votre fusée lors de la collision nous désirée d’un booster dans KSP ^^), mais aussi des vitesses, forces et vibrations très différentes, entrainant tout un lot de contraintes majeures et encore méconnues par les équipes, sur l’ensemble du lanceur. Toutes ces innovations expliquent en partie le retard du vol sur lequel nous reviendrons mais il permet surtout de mieux appréhender pourquoi Elon Musk annonçait, encore quelques heures avant le décollage, qu’une probabilité de réussite complète n’excédait pas les 50%, selon lui.

 

Photo du décollage prise par Brady Kenniston for NASAspaceflight.com avec son autorisation

Entrons un peu plus dans les détails du lanceur ! La Falcon Heavy a une masse au décollage de près de 1 420 tonnes pour une hauteur de 70m. Elle dégage une poussée maximale au décollage de 22 819kN, permettant à cet édifice de devenir l’actuelle fusée la plus puissance en service ! Cependant, la fusée n’utilise pas ses 27 moteurs Merlin 1D a pleine puissance au décollage : les 9 moteurs de l’étage principal sont réduits en poussée pour que celui-ci, qui dispose de la même configuration et d’autant de carburants que les boosters, puisse resté allumé plus longtemps, après séparation des Cores latéraux. Si on compare un peu ce lanceur avec sa petite sœur dont il est issu, la Falcon 9, on remarque que la Falcon Heavy peut envoyer jusque 63,8t en orbite basse terrestre pour ‘‘seulement’’ 22,8t pour la F9. En ce qui concerne la GTO, l’orbite de transfert géostationnaire, la Falcon Heavy garde une capacité de 26,7t contre 8,3t. Ces quatre valeurs marquent la masse maximale que peuvent envoyer ces deux fusées si aucune partie n’était récupérée : on appelle ces versions « Expandable ». Cependant vous n’êtes pas sans savoir que SpaceX sait maintenant récupérer des étages sur la terre ferme ou sur des barges dans l’océan (ou même parfois directement dans l’eau, pour des tests !). Si on prend en compte ces récupérations qui consomment du carburant pour assurer le retour, la Falcon 9 chute à 5,5t et la Falcon Heavy à 8t, en GTO.

 

 

Photo du décollage

Ces baisses peuvent paraître très importantes, surtout pour la nouvelle Falcon Heavy, mais elles font partie intégrante du concept Falcon réutilisable. En effet, si SpaceX a décidé de construire ce nouveau lanceur, ce n’est pas tant pour pouvoir envoyer plus de 60t en orbite basse, même si cela présente une capacité maximale confortable, mais plutôt pour pouvoir toujours récupérer les premiers étages de ses lanceurs, une perspective économique et logistique qui est chère à l’entreprise. En effet, la version Block 5 du premier étage de Falcon 9 est bientôt prête à entrer en service, et d’après l’agence privée américaine, ces boosters seront réutilisables des dizaines de fois et jusqu’à 100 vols par unité. Rappelons que le premier étage est de loin la partie la plus chère du lanceur et pouvoir la récupérer peut vite devenir un formidable atout économique dont seul SpaceX fait l’expérience à l’heure actuelle, prenant une confortable avance sur ces domaines lourds en expertise et savoir-faire.

 

Photo rapprochée du décollage prise par Brady Kenniston for NASAspaceflight.com avec son autorisation

Pour en revenir un peu plus en détail sur ce vol inaugural de la Falcon Heavy, celui-ci était initialement prévu pour… Décembre 2012 ! En avril 2011, Elon Musk présentait les projets futurs de sa société dans une conférence de presse à Washington et il avait explicitement évoqué que son nouveau lanceur sera sur le pas de tir d’ici la fin de l’année 2012. Comme vous le constater et comme vous l’aurez sans doute remarqué à plusieurs reprises si vous connaissez un peu le phénomène Musk, ce vol a connu un ‘’petit’’ retard. Cela s’explique par plusieurs paramètres : tout d’abord, l’entreprise n’avait tout simplement pas assez de boosters de Falcon 9 près pour former une Falcon Heavy sans perdre trop d’argent et de temps sur les contrats engagés. En parlant d’économie, la société en était encore à ses débuts : le premier vol de Falcon 9 était en juin 2010. L’autre raison majeure repose sur le manque d’expérience de la jeune entreprise, à cette époque, face à ce challenge de taille. En plus de n’avoir encore jamais réussi la récupération d’un booster (cette prouesse technologique arrivera en 2015 avec le vol OrbComm OG2), les fusées Falcon n’en étaient encore qu’à leurs premières versions et allaient connaître de nombreuses améliorations par la suite, dont dépendent aujourd’hui le succès des récupérations. Chaque année, le public attendait avec impatience la Falcon Heavy de SpaceX et c’est sur la fin de 2017, que nous avons pu voir pour la première fois une preuve que le lancement était en réelle approche : les photos du lanceur dans le hangar d’assemblage.

 

Photo de la Falcon Heavy sur son pas de tir le matin du lancement

Quelques jours après, les évènements se sont enchaînés. On nous annonce que la charge ‘’utile’’ du vol inaugural sera la voiture Tesla Roadster d’Elon Musk avec un mannequin portant la combinaison de vol de SpaceX. Certains estiment ce choix très discutable mais, également président de la marque de voiture électrique Tesla, Musk réalise un tour de force marketing difficile à égaler. Ce chef d’entreprise déluré avait également annoncé vouloir envoyer la chose la plus stupide, et ce n’est pas sans précédent : rappelons que pour le vol inaugural de la capsule Dragon, SpaceX avait envoyé une meule de fromage, qui a été récupérée et dégustée après récupération de la capsule ! Il ne faut pas toutefois pas éluder que pour ce vol du 6 février, SpaceX avait proposé à la NASA un envoi de satellites gratuits, ce qui s’est soldé par un refus, en partie pour éviter une compétition NASA SLS / SpaceX Falcon Heavy mais également en connaissance du risque d’échec non négligeable. 3 tests de remplissage plus tard, l’entreprise tente un allumage statique des plus impressionnants, le 24 janvier, ce qui marque le début de la cristallisation de toutes les attentes et de la ferveur médiatique : le compte à rebours définitif était lancé. Le lancement de la Falcon Heavy connaitra quelques nouveaux reports et sera annoncé avec davantage de certitude : ce sera le 6 février 2018 !

 

Photo du décollage sur laquelle on voit très bien la manœuvre de Gravity Turn

Venons-en au vol, riche en évènements ! Le décollage était prévu initialement à 19h30 (heure française) et la fenêtre de tir devait durer 2h. Cependant des problèmes de vents en altitude implique de reporter le vol et l’horaire glisse : 20h30, 21h00, 21h10, il devient de moins en moins sûr qu’un décollage ait lieu le 6, le lendemain demeurant une fenêtre potentielle. Finalement la nouvelle tombe, le décollage aura lieu à 21h45 après un allongement de la fenêtre à 22h30 si nécessaire. Les réservoirs commencent à se remplir et les voyants restent au vert pendant que les autorisations et validations s’enchainent sans heurt. Le décompte final est lancé : 5…4…3…2…1…Allumage des 27 moteurs ! Et deux petites secondes stressantes plus tard, les pinces relâchent le lanceur qui s’envole vers le ciel. La Falcon Heavy effectue une première phase de vol magnifique avec une météo des plus flatteuses, puis les deux boosters latéraux se séparent et l’étage central continue sa route pendant encore trente petites secondes. Pendant ce temps, les deux boosters se sont retournés et ont rallumés 3 moteurs pour revenir vers Cape Canaveral. Alors que le second étage prend le relai, l’étage central effectue un premier allumage de 3 moteurs pour ralentir un peu et viser correctement la barge OCISLY (Of Course I Still Love You). La coiffe est ensuite séparé à T+3:49 et trois minutes plus tard, les trois boosters rallument à quelques secondes de décalage les 3 mêmes moteurs pour ralentir et éviter de brûler dans l’atmosphère.

 

Atterrissage synchronisé des deux boosters latéraux

Huit minutes après le décollage, ce sont donc les deux boosters latéraux qui atterrissent en premier, aux LZ1 et LZ2 (Zones d’atterrissages de SpaceX à Cape Canaveral). Ce double atterrissage était très impressionnant car totalement synchronisé, en plus d’être une première. Sur des vidéos plus lointaines, on voit même que le premier booster ‘’attend’’ le second. Ce ralentissement s’explique par une manœuvre que l’on peut rapidement apercevoir sur les vues rapprochées des boosters. On voit un seul moteur allumé au début mais quelques secondes après, deux autres moteurs s’enflamment avant de se rééteindre, se rallumer et s’éteindre à nouveau. SpaceX n’avait jamais réalisé un atterrissage de ce type avant mais s’était justement entrainé sur le dernier vol de Falcon 9. Cela permet de considérablement réduire la durée pendant laquelle le propulseur doit décélérer, et donc de limiter les pertes par gravité : SuicideBurn, vous avez dit ? 😉

 

 

Vue des LZ 1 et 2 par le satellite Deimos 2 de Deimos Imaging, an UrtheCast Company avec leur autorisation

Le booster central a également allumé 3 moteurs quelques secondes après les boosters latéraux pour atterrir sur sa barge. Cependant, au moment prévu de l’atterrissage, les caméras sont passés d’une vue propre du plateau et de l’océan à un immense panache de fumée, image figée. SpaceX a communiqué quelques heures après le déroulé de l’incident : ce Center Core s’est en effet abimé dans l’océan à 480km/h à quelques 100m de la barge. L’étage n’a évidemment pas survécu et l’agence va continuer d’étudier les données ainsi que la barge pour comprendre le problème. Le principal disfonctionnement évoqué serait un manque de carburant d’allumage : le moteur Merlin 1D utilise un mélange de triéthylborane et triethylaluminium qui forme un carburant pyrophorique et c’est cette propriété de combustion par « simple mélange » qui allume le moteur. Ici, il n’y aurait pas eu assez de ce mélange et un seul moteur ne pouvait fournir la poussée nécessaire à l’annulation de la vitesse en vue d’un atterrissage propre.

 

Vue du Starman pendant son départ de la Terre

De son côté, le second étage a continué son travail pour mettre la voiture sur une orbite excentrique terrestre. Cet étage a stationné six heures en orbite avant de rallumer son unique moteur Merlin 1D Vac pour propulser la Tesla avec le Starman, mannequin équipé de la combinaison. Cette Tesla, qui portait sur sa base le nom de 6000 employés de SpaceX gravés, a été accélérée jusqu’à atteindre une orbite héliocentrique ayant pour périgée la Terre et pour apogée la ceinture d’astéroïdes entre Mars et Jupiter. Une si longue attente en orbite aurait pu causer de graves problèmes au second étage. Le froid spatial pouvait congeler le kérosène RP-1 tandis que le vide aurait pu causer une évaporation de l’oxygène liquide. Cependant aucun souci technique n’a été noté et Starman est maintenant en route pour l’espace profond ! Par ailleurs le carburant de l’étage a été utilisé intégralement, plutôt qu’un arrêt précis pour viser une apogée donnée : il n’est pas aisé de comprendre ce qui a motivé cette décision, qui fait passer l’aphélie de l’orbite de Mars, la cible, à un peu plus haut, sans toutefois atteindre l’orbite de Cérès. On peut légitimement supposer que l’occasion était belle de tester l’ensemble à son maximum et d’évaluer jusqu’où le DeltaV saurait emmener la Tesla et son occupant !

 

Voici un résumé de toutes les informations du vol sous deux formes différentes :

 

Le lancement inaugural de la Falcon Heavy est donc un succès quasi-total. Elon Musk a annoncé que SpaceX allait maintenant se concentrer principalement sur sa nouvelle grosse fusée : la BFR. On terminera par remarquer que ce vol a attiré plusieurs millions de personnes, de plus en plus nombreux à s’intéresser au spatial : la personnalité sans limite ni filtre de Musk n’y est certainement pas pour rien, de ses annonces fantasques à ses réalisation concrètes toujours plus innovantes, difficile de damer le pion à ce personnage devenu central dans la course à l’Espace !

Pour (re)voir le lancement, cliquez sur le lien ici : https://www.youtube.com/watch?v=wbSwFU6tY1c

Et pour assister au départ de Starman, c’est là : https://www.youtube.com/watch?v=aBr2kKAHN6M

 

Sources : SpaceX, Elon Musk

 

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Où suivre le Maiden Flight de la Falcon Heavy de SpaceX ?

mardi, février 6th, 2018

Ce soir, c’est le grand soir, celui du probable décollage de la Falcon Heavy, attendu par tous les SpaceGeek de la planète, autour de 19h-22h ! Nous n’allons pas revenir sur les spécificités de ce nouveau venu sur le marché des lanceurs, un article-dossier vous sera très prochainement publié. Il s’agira plutôt ici de rassembler quelques informations sur la retransmission de l’événement et des moyens dont vous disposez pour suivre cela 🙂

Le plus évident, c’est bien sur le Live de SpaceX lui même que vous allez pouvoir retrouver sur leur site mais également sur YouTube directement, et il est déjà accessible :

Côté Live, ce n’est pas terminé puisque pas moins de 4 vidéastes français sont sur places en ce moment même, représentant les chaines Techniques Spatiales, Stardust – La chaine Espace, Amixem et WalaneRider ! Vous connaissez certainement Vicnet, qui réalise de nombreuses vidéos sur le thème de l’Espace et de l’aviation en général, eh bien ce dernier proposera une retransmission Live avec ses commentaires sur place, en direct : du français, de l’inédit, il faut en profiter 🙂 A défaut d’un canal Live ouvert sur YouTube, nous vous mettons en lien sa page Vidéo, à surveiller de près, nous mettrons l’article à jour en conséquence. Si le nom de la chaîne « Techniques Spatiales » vous dit quelque chose, c’est certainement parce que vous êtes tombés sur l’une de ses récentes vidéos : le réalisateur prend le parti de la précision et de l’exactitude pour produire un format minutieux, travaillé, profitant de son expertise et de ses connaissances manifestement très pointues des sujets abordés ! Nous ne pouvons que vous conseiller de vous y abonner pour en apprendre toujours plus, et de suivre son compte Twitter : il est sur place pour le lancement et devrait fournir quelques informations de premières mains sur les événement à venir 🙂 Oh, au fait, Vicnet et Techniques Spatiales vont également concentrer une partie de leurs activités réseaux via le métacompte Twitter « People of Space » dont ils ont les commandes pendant ce séjour !

Toujours côté Live, c’est le YouTube prolixe Hugo Lisoir et son frère qui proposeront leur premier Live de lancement : nous verrons si le calme épique de ses vidéos narrative sera également de mise, nous parions que non, côté staff :p Idem, pas de canal ouvert pour le Live à l’écriture de cet article, mais ça se passera sur leur page Twitch ! Une chaîne qu’il vous faut découvrir si vous ne connaissez pas : un rythme de vidéo ahurissant tout en préservant une qualité au top, ce n’est pas chose fréquente et ici c’est vraiment très bien fait 😉

On note également le compte Twitter naissant « Space Oddity » qui organise son propre Live commenté sur Youtube, avec de fins connaisseurs comme invités audio, parmi lesquels l’auteur et blogueur dont nous sommes fans, Eric Bottlaender !

Forcément, le partage, c’est encore mieux quand on peut en profiter IRL… Eh bien sachez que certains bars diffuseront le Live du lancement : l’occasion d’assister à une réussite ou un échec, mais entouré de passionnés et avec une bonne bière à la main 😉 Nous serons peut être de la partie de notre côté, avec quelques Tweets pour l’occasion mais rien n’est sur : en attendant, de vos côtés, n’hésitez pas à organiser de telles retrouvailles, dans un bar ou chez vous, pour partager le moment à plusieurs ! Internet, c’est cool, ça rapproche même les gens IRL ^^

N’hésitez pas à nous faire savoir si vous connaissez d’autres moyens de profiter de ce Live, en postant une réponse à cet article, juste ici !

Dernier lancement de SpaceX avant la Falcon Heavy

jeudi, février 1st, 2018

Falcon Heavy et Falcon 9 sur leur pas de tir respectifs

Une semaine après avoir allumé les 27 moteurs de la Falcon Heavy pour réaliser un test statique, SpaceX lançait un nouveau satellite en orbite à bord d’une Falcon 9. Ce satellite se nomme GovSat-1 et c’est LuxGovSat S.A. qui l’opère. La fusée a décollé le 31 janvier à  22h25 (heure française) depuis le pas de tir LC-40 de Cape Canaveral. Etant donné que la Falcon Heavy est sur le pas de tir 39A, des photographes ont pu saisir quelques clichés faisant figurer les deux lanceurs : impressionnant ! Ci-contre, la Falcon 9 ne possède que le premier étage car il effectuait un test d’allumage, cher à l’entreprise.

 

 

Un satellite d’un tout nouveau genre

Objectifs civils et militaires de GovSat-1

GovSat-1 est un satellite opéré par une co-entreprise privé-public entre le gouvernement Luxembourgeois et le plus grand gérant de satellites au monde : SES. Le but de cette agence est de fournir un service de communication par satellites qui soit sûre, fiable et accessible. Ce service pourra être utilisé par les différents gouvernements du monde afin de répondre à la demande de connectivité résultante de la sécurité civile et de la défense.

 

 

 

 

Satellite GovSat-1 avec des ingénieurs à côté pour avoir une idée de la taille de celui-ci

Ce premier satellite de LuxGovSat S.A. a été construit par la société américaine Orbital ATK. Il sera en opération depuis une orbite géostationnaire au-dessus du méridien 21,5° Est. Celui-ci passe par la Suède, Pologne et plus loin, l’Afrique du Sud. GovSat-1 est construit pour opérer au moins pendant 15 ans depuis son orbite et devrait entrer en service d’ici mars 2018. La masse de ce satellite est de 4320kg, ce qui reste bien en dessous de la masse maximale que peut envoyer une Falcon 9 sur une orbite GTO (ce maximum est de 8 300kg). GTO signifie Orbite de Transfert Géostationnaire, c’est-à-dire une orbite qui aura pour apogée 36 000km (altitude des satellites géostationnaires) et un périgée bien plus bas (moins de 500km). En effet, les lanceurs ne placent jamais (sauf très rares exceptions) leur charge utile directement sur une orbite géostationnaire. Après leur insertion sur cette orbite de transfert, le satellite allume ses propulseurs une fois à l’apogée pour circulariser sa trajectoire : cela devrait parler à plus d’un joueur KSP !

 

 

 

 

Schéma montrant les zones couvertes par les différents signaux

GovSat-1 est équipé de nombreuses antennes de différentes tailles mais qui équivalent, au total, à 68 antennes de 36MHz. Ces antennes permettent au satellite de communiquer en bande X et Ka. La bande X est réservée aux opérations gouvernementales et est un très bon moyen d’établir un contact entre des théâtres d’opérations tactiques, des missions maritimes ou dans des zones affectées par des crises humanitaires. La bande Ka utilisée ici est une bande Ka-militaire. Cette dernière est privilégiée pour les opérations de surveillance, de renseignement et de reconnaissance. GovSat-1 peut émettre cette bande principalement dans la Méditerranée ce qui facilitera la surveillance des frontières de l’espace Schengen. Grâce au grand nombre d’antennes que possède ce satellite, sa couverture est très importante. Il possède un système de six antennes qui peuvent être tournées et être très précis au sol. En plus de cela, il est équipé d’un rayon global en bande-X qui couvre une très large zone : du solide donc.

 

Différentes configurations possibles du satellite GovSat-1

En plus de ses antennes, GovSat-1 utilise un système innovant qui permet d’éviter tout brouillage du signal. La télémétrie (ensemble des informations sur le satellite en lui-même) ainsi que le signal pour contrôler le satellite sont totalement cryptés. Une des forces et innovations de ce satellite vient des nombreuses configurations de signaux possibles. Vous retrouverez ci-contre toutes ces configurations avec la bande utilisée pour tel ou tel signal. L’ensemble de ces nouvelles technologies, des différentes configurations et de la mission civile et militaire font de GovSat-1 un satellite d’un nouveau genre.

 

 

 

 

Lancement à bord d’une Falcon 9 réutilisée mais pas récupérée

Atterrissage du booster 1032 sur la LZ-1 après le lancement du satellite NROL-76 en mai 2017

On peut voir sur des photos du lanceur qu’il est couvert de suie. Comme pour CRS-13, cette suie s’explique par le fait que le premier étage a déjà volé précédemment mais qu’il n’a pas été nettoyé. Pour ce 45ème vol de Falcon 9, c’est le booster 1032 qui a été utilisé pour la seconde fois. Celui-ci avait décollé une première fois pour envoyer le satellite secret NROL-76 en mai 2017. Quelques minutes après le lancement, le booster est venu se poser en douceur à Cape Canaveral sur la LZ-1 (Zone d’Atterrissage 1). Il a ensuite été inspecté en détail pour vérifier que rien n’était endommagé avant de recevoir un second étage tout neuf. En effet, SpaceX ne récupère pas le second étage car il est beaucoup trop délicat de le faire rentrer dans l’atmosphère à des vitesses aussi importantes. Le 26 janvier 2018, cette nouvelle fusée a été dressée sur son pas de tir et a réalisé un test statique de ses moteurs. Ce test permet aux ingénieurs de SpaceX de vérifier que tous les systèmes de vol ainsi que tous les moteurs sont prêts au vol et donc réduire au minimum le risque d’échec : c’est un test d’autant plus important avec l’aspect réutilisable des premiers étages qui subissent des stress importants ! Après ce test, la fusée a été ramené dans son hangar (le HIF) pour y installer la coiffe avec GovSat-1 sur le second étage. En effet, depuis l’échec d’Amos-6, SpaceX ne réalise plus de test statique avec le satellite. Pour rappel, quelques minutes avant le test statique de la Falcon 9 qui devait emmener le satellite israélien, le premier étage a explosé, ce qui fut une période difficile de SpaxeX concernant la perte du satellite et la partielle remise en question de la fiabilité de ses vecteurs et des procédés de tests.

 

Patch officiel de la mission GovSat-1

Initialement, ce lancement était prévu pour le 30 janvier. Comme vous pouvez donc l’imaginer, un report de 24h a eu lieu. Ce report a deux raisons. La première est la cause de décalage la plus fréquente : les vents en haute altitude. En effet, ces vents peuvent causer une perte totale de contrôle de la fusée s’ils sont trop importants. Néanmoins, cette raison n’est pas la seule : SpaceX a annoncé qu’un capteur posait problème sur le second étage. Ce capteur a donc été changé rapidement pour qu’une nouvelle tentative puisse avoir lieu le lendemain. Aucun détail plus précis n’a été donné sur le capteur qui était la source de ce souci.

 

 

 

Falcon 9 sur son pas de tir le 31 janvier

Comme on peut le voir, le lanceur était équipé de ses quatre jambes d’atterrissage et de ses quatre grid fins. Cependant, le booster ne sera pas récupéré. Pourquoi ne pas faire atterrir cet étage qui semblait pourtant pouvoir le faire ? Il existe plusieurs raisons à cette décision. La plus évidente aurait pu être le manque de carburant mais comme expliqué précédemment, le satellite n’atteignait que la moitié de la charge maximale. Les deux explications qui ont donc favorisées ce choix sont les suivantes : le booster 1032 est une version Block 3 et SpaceX va bientôt développer le Block 5 qui sera bien plus puissant et pourra être réutilisé des dizaines de fois. La compagnie privée préfère se « débarrasser » progressivement des étages devenus obsolète pour stabiliser sa flotte sur le vecteur le plus récent et performant. La seconde raison est le lancement de la Falcon Heavy dans quelques jours, et c’est sans doute un motif suffisant : étant donné que GovSat-1 est envoyé sur une orbite GTO, le booster n’a pas assez de carburant pour revenir à Cape Canaveral, au sol : il aurait donc dû atterrir sur la barge automatisée OCISLY (Of Course I Still Love You). Néanmoins, c’est cette même barge qui sera utilisée pour essayer de récupérer le booster principal de la Falcon Heavy. La logistique d’un tel aller-retour et le risque d’un endommagement ou d’une destruction au dernier moment pour un étage vieillissant n’était pas du goût de SpaceX !

 

 

 

Premier étage de la Falcon 9 après son « atterrissage »

On serait tenté d’y voir une perte mais il n’en est rien : comme pour le lancement d’Iridium-4, SpaceX profite de ne pas avoir de risque de rater l’atterrissage pour réaliser des tests. Ces derniers peuvent aller d’un profil de rentrée plus violent à un problème simulé comme un grid fin qui ne veut pas se déployer. Rien de tel qu’un étage considéré perdu pour tenter quelques petites choses exotiques ! Pour le vol de GovSat-1 le test réalisé a été au niveau de l’allumage final pour faire atterrir l’étage. Normalement, le premier étage d’une Falcon 9 atterrit en allumant un seul moteur Merlin 1D. La poussée de 654kN de ce simple réacteur suffit à ralentir l’étage pour toucher le sol (ou la barge) en douceur. Cependant, sur ce test, SpaceX a décidé de ralentir le booster en utilisant non pas un mais trois Merlin 1D. Ce changement permettrait au booster de réaliser un allumage plus tardif et donc d’économiser du carburant, ce qui peut résulter en une augmentation de la charge utile maximale que peut envoyer une Falcon 9. Là encore, cette manœuvre de « Suicide Burn » devrait trouver des afficionados dans nos fans de KSP, n’est-ce pas ? En écoutant les communications entre ingénieurs au sol, on peut se rendre compte que cet allumage final n’a duré que 10 sec contre environ 25 sec pour un atterrissage normal. Malgré le fait qu’OCISLY n’était pas là pour récupérer l’étage, 1032 a été retrouvé en plutôt bon état après avoir touché l’eau en douceur (voir photo ci-contre).

 

Voici une liste des évènements du vol ainsi que des photos :

Décollage de NROL-76

Falcon 9 sur son pas de tir pour le vol de GovSat-1

Décollage de GovSat-1

Photo du décollage prise de très près. Crédit : @timelpasejunkie

Pitch kick = Manœuvre pendant laquelle le lanceur commence à tourner pour augmenter sa vitesse horizontale et se mettre en orbite

Max-Q = Moment pendant lequel le lanceur reçoit le plus grand stress aérodynamique

Séparation du premier étage. On peut voir celui-ci à droite de la tuyère du second étage

GovSat-1 dans la coiffe juste avant la séparation de cette dernière

GovSat-1 sur son orbite de parking avant le deuxième et dernier allumage du second étage

Séparation de GovSat-1. On peut voir le moteur de celui-ci au milieu de l’image. C’est ce moteur qui lui permettra de passer de GTO à GEO

 

Globalement, SpaceX a réussi avec un vol parfait le lancement du satellite luxembourgeois GovSat-1. Un nouveau type d’atterrissage a même pu être testé avec succès. Si tout se passe comme prévu, le prochain vol de la compagnie sera le vol inaugural de leur lanceur lourd : la fameuse Falcon Heavy qui pourra placer plus de 50t en orbite basse. Ce lancement devrait avoir lieu le 6 février et nous vous prévoyons un bel article-dossier sur KSC pour ce vol ! C’est donc SpaceX qui clôture le mois de janvier niveau spatial, pendant lequel près de 13 fusées ont décollé vers l’orbite.

Sources : SpaceX, LuxGovSat S.A.

 

Une nouvelle nation dans l’ère du spatial !

jeudi, janvier 25th, 2018

Décollage de It’s a test

Le 21 janvier 2018 à 2h43 (heure française), RocketLab lançait pour la seconde fois son lanceur Electron depuis la Nouvelle-Zélande. Cette fusée légère de 1,2 mètres de diamètre et 17 mètres de haut a décollé pour un second vol de test après l’échec partiel du 25 mai 2017. Sur ce premier vol nommé It’s a test, la compagnie américaine avait lancé une fusée sans charge utile, simplement pour tester le lanceur et montrer au monde entier qu’un nouvel acteur était de la partie. Malheureusement un problème de configuration d’une radio sur le second étage a compromis l’ascension et le lanceur n’a pas atteint l’orbite. Ce vol à toutefois permis aux équipes de constater que le premier étage d’Electron a réalisé un décollage et une trajectoire exemplaire. Ce second vol nommé Still Testing, emportait quatre petits satellites qui seront décrits plus loin.

Un lanceur avec de nombreuses particularités

Test statique du moteur Rutherford

Electron est propulsé par des moteurs Rutherford. Ce nom de moteur vient du physicien néo-zélandais à l’origine de la découverte d’une particule subatomique nommée électron. On compte un total de dix moteurs Rutherford sur la fusée de RocketLab. En effet le premier étage est propulsé par neuf de ces réacteurs tandis que le second étage en utilise un seul qui possède une tuyère adaptée pour le vide spatial. L’espace étant (quasiment) vide, les gaz sortants du moteur ont besoin d’être plus détendu pour s’approcher de la pression ambiante et donc maximiser la poussée. Le moteur Rutherford qui a subi de nombreux tests au sol avant les lancements de It’s a test et Still Testing a donc été mis en avant très vite avec ce nombre important de réacteurs qui réduit les coûts en augmentant les volumes. L’autre spécificité de ces moteurs vient de leur méthode de fabrication. En effet, contrairement à des moteurs Vulcain (Ariane 5 et 6) ou Merlin (Falcon 9 et Heavy) qui sont construits grâce à de grandes machines industrielles, le moteur Rutherford est en grande partie imprimé en 3D. Cette méthode d’impression métal rend la fabrication des moteurs plus rapide et moins chère, et potentiellement plus fiable en maximisant les pièces d’un bloc, même avec des géométries les plus complexes et impossible à obtenir par usinage conventionnel.

La deuxième différence majeure de ces moteurs par rapports à ceux auxquels nous sommes généralement habitués, c’est le moyen d’acheminement des carburants jusqu’à la chambre à combustion. La plupart des moteurs actuels utilisent ce qu’on appelle en ingénierie aérospatiale des turbopompes. Ces dernières sont utilisées pour accélérer les carburants et les pressuriser avant d’entrer dans la chambre de combustion. Une turbopompe est mise en rotation par un générateur de gaz qui va faire brûler du carburant dans une première chambre à combustion. Les gaz accélérés par cette combustion sont ensuite dirigés vers une turbine avant d’être éjectés par le(s) pot(s) d’échappement. C’est cette première turbine qui va faire tourner les deux autres turbines qui acheminent le carburant vers le moteur. Cependant, Electron n’utilise pas ce système mais en utilise un qui n’a encore jamais été exploité sur des fusées orbitales : des pompes électriques. Pour faire simple, le lanceur emporte des batteries qui vont faire tourner des moteurs électriques et c’est grâce à la rotation rapide de ces moteurs que les ergols sont amenés dans la chambre à combustion principal.

Moteur Rutherford

Malgré sa petite taille, le moteur Rutherford est très compétitif par rapport aux autres moteurs de fusée actuels. Pour mesurer l’efficacité d’un moteur et d’un mélange, on utilise un paramètre appelé impulsion spécifique ou Isp, mesuré en secondes. L’Isp d’un moteur correspond à la durée pendant laquelle celui-ci peut fonctionner avec 1kg d’ergols et avec une poussée de 9,8N (force équivalente à la force gravitationnelle appliqué sur un poids de 1kg sur Terre). Pour le moteur Merlin 1D de SpaceX, on obtient une Isp de 311 secondes et le moteur F-1 de la gigantesque SaturnV atteint les 265 secondes. Le moteur Rutherford, de son côté, arrive à près de 303 secondes. Cette durée est impressionnante et est en grande partie due aux pompes électriques. En effet, Rutherford n’a pas besoin de ‘gaspiller’ du carburant dans le générateur de gaz et peut donc se concentrer sur la poussée. Sur la vidéo de lancement (voir plus loin dans l’article), on peut voir que le deuxième étage largue ses batteries vides. Cette manœuvre permet d’alléger l’étage et donc lui fournir une meilleure performance.

Second étage du lanceur Electron

La dernière spécificité du lanceur Electron est la nature de ses réservoirs. En effet, là où des lanceurs comme Ariane 5 ou Falcon 9 utilisent des réservoirs métalliques, RocketLab a décidé encore une fois d’innover. Les réservoirs de la petite fusée sont fabriqués avec des matériaux composites comme du carbone tissé. L’intérêt de ce type de réservoirs est dans un premier temps leur masse : les matériaux composites sont en effet beaucoup plus légers que des métaux. En plus de cette différence, le carbone isole très bien de la chaleur et c’est pour cela que la compagnie peut se permettre d’avoir une fusée entièrement noire sans risque de surchauffe du carburant, une problématique qui avait impliqué les modifications de peintures des premières SaturnV. Il et en effet nécessaire d’anticiper la chauffe des ergols et de les limiter autant que possible, car cela réduit leur densité, entrainant des pertes par évents, et le réservoir pourrait ne plus contenir assez de carburant pour que le lancement atteigne son objectif.

Un lancement de nombreuses fois repoussés

Electron sur son pas de tir

Le vol StillTesting était initialement prévu pour le 8 décembre 2017 mais différents problèmes ont forcé la société a repoussé le lancement. La première raison de report du vol est la présence de vents en altitude trop rapides. Quelques heures avant tout lancement de fusée, des ballons sondes sont lâchés pour étudier les vents d’altitudes. Si ceux-ci sont trop violents, le lancement devra être repoussé car ils vont rendre instable la fusée une fois qu’elle arrivera dans cette zone. Le 8 décembre, le lancement a donc connu un premier report de 24h pour cause de vents en haute altitude. Le lendemain, nouveau report pour la même raison et ce jusqu’au 12 décembre.

Le 12 décembre les vents en altitude s’étaient calmés, il faisait un grand soleil et une très belle température sur le pas de tir de RocketLab, dans l’ile du Nord de la Nouvelle-Zélande : une journée parfaite pour un lancement. C’est ce que tout le monde se disait mais à T-2 secondes avant le lancement, alors que les moteurs venaient de s’allumer, l’ordinateur de bord d’Electron détecte une anomalie sur le lanceur et annule le lancement qui sera reporté encore une fois. Pour comprendre ce nouvel avortement, il est important de détailler légèrement les procédures post-lancement :

Lancement du 12 décembre annulé juste après l’allumage des moteurs

Quelques heures avant le décollage, les réservoirs d’Electron commencent à être remplis en oxygène liquide et en RP-1 (kérosène très raffiné) refroidi. Etant que ces deux carburants sont froids mais que l’intérieur des réservoirs est chaud, les ergols vont commencer à bouillir et à s’évaporer le temps que les réservoirs refroidissent. Pendant cette phase et pour éviter que ces derniers n’explosent à cause d’une surpression, une petite valve est ouverte pour que les gaz sous pression et l’air contenu dans les réservoirs puissent s’échapper. Si vous avez déjà vu un lancement de SpaceX, vous aurez sûrement remarqué de grands nuages de fumées sur les côtés du lanceur. C’est en fait la vapeur d’eau contenue dans les réservoirs ainsi que celle à la sortie de la valve qui se condense au contact des carburants cryogéniques et qui forme ce grand panache. Ce qui s’est passé le 12 décembre 2017 est un problème lié à cette procédure de ‘venting’. En effet, il faisait très chaud en Nouvelle-Zélande ce jour-ci et cette hausse de température à commencer à réchauffer le carburant dans les réservoirs via les valves. Peu avant le lancement, l’ordinateur de bord a donc détecté une température anormalement élevée des ergols et à décider d’annuler le lancement. Si vous souhaitez voir cette annulation assez spectaculaire (les moteurs se sont allumés et ont été éteints une fraction de seconde après) c’est juste ici : https://www.youtube.com/watch?v=DnpJj6DhweU .

A la suite de ce nouvel échec temporaire, le lancement a été décalé jusqu’à 2018. En effet le problème du 12 décembre n’a été découvert que le lendemain et le 15 une anomalie sur l’alimentation en électricité du pas de tir a été découverte. Cette anomalie a été réparé le 16 mais il ne restait plus qu’un jour avant la fermeture de la fenêtre de tir et RocketLab a donc pris la décision de reporter le lancement à l’année suivante. La nouvelle fenêtre de 9 jours s’est ouverte le 20 janvier 2018. Ce même jour, la fusée était en place sur son pas de tir mais des vents en altitude ainsi qu’un bateau dans la zone maritime réservée au lancement ont compromis le vol qui a été à nouveau reporté au lendemain. Décidemment… On arrive donc au 21 janvier, jour pendant lequel toutes les conditions de lancement ont été réunies pour le lancement de la mission Still Testing qui s’est avéré être un véritable succès.

Quatre satellites et un étage secret

Pour ce second vol de test, RocketLab a décidé, avec l’accord des sociétés clientes, d’envoyer trois satellites commerciaux en orbite. Ceux trois satellites font parti de deux familles différentes. La première se nomme Dove et la seconde Lemur-2.

Photo de deux satellites Dove peu de temps après leur largage depuis l’ISS

C’est donc un satellite Dove qui a décollé à bord d’Electron pour rejoindre la constellation du même nom, constellation opérée par la compagnie californienne Planet. L’objectif de cette entreprise est d’imager la Terre rapidement à des fins commerciales. Certains satellites Dove ont été lancés lors de lancements précédents, à partir de 2013 tandis que d’autres ont eu la chance d’être larguées depuis l’ISS et ont donc obtenu leur photo souvenir comme celle ci-contre. Les satellites Dove pèsent environ 5kg et se présentent sous la forme de CubeSats 3U. Ils sont équipés d’imageurs télescopiques pouvant effectuer des images en noir et blanc, couleurs et dans l’infrarouge proche avec une résolution au sol de 3 mètres. Si vous vous souvenez, quatre de ces satellites avaient décollés à bord du vol indien PSLV C40 sous le nom de Flock-3p’ (article parlant de ce lancement ainsi que d’un lancement chinois : https://kerbalspacechallenge.fr/2018/01/14/double-lancement-chinois-et-indien-en-un-jour/ ).

Vue d’artiste d’un satellite Lemur-2 en orbite

Ce sont ensuite deux satellites Lemur-2 qui ont été placés sur orbite par Electron pendant ce vol. Ces nouveaux arrivants permettront d’agrandir leur constellation de mesure de l’atmosphère pour améliorer les prévisions météos ainsi que le trafic maritime opérée par la compagnie Spire. Lemur-2 a été inauguré en 2015 avec quatre premiers satellites lancés par un PSLV et elle compte aujourd’hui 61 CubeSats 3U fonctionnels. En effet, en plus de ces 61 satellites, 12 ont rencontré des problèmes : deux n’ont pas réussi à se déployer en orbite et dix autres ont été perdus lors de l’échec du lancement de Soyuz de novembre 2017. Les Lemur-2 sont habituellement largués par des fusées indiennes PSLV et des Soyuz russes mais aussi par des cargos américains Cygnus après que ces derniers aient ravitaillé l’ISS. Les deux charges utiles de Lemur-2 sont SENSE et STRATOS : le premier est dédié au trafic maritime et le monitoring en servant de relais entre les bateaux en mer et les stations au sol. De son côté, STRATOS étudie l’atmosphère en mesurant l’occultation des signaux GPS. Suivant comment Lemur-2 reçoit le signal de tel satellite GPS, il pourra calculer la température, la pression et l’humidité de l’atmosphère à telles ou telles altitudes. Quatre de ces satellites ont également décollés à bord de la mission PSLV C40 (lien au-dessus).

Humanity Star à côté de Peter Beck

Le PDG de RocketLab, Peter Beck a annoncé trois jours après le lancement qu’un quatrième satellite était présent pendant ce vol. Ce satellite nommé Humanity Star a été crée par la société américaine responsable du lancement. Ce satellite en forme de sphere géodésique est composé de 65 miroirs très réfléchissants. Humanity Star est en rotation rapide sur lui-même pour créer un flash lumineux répété visible depuis le sol. Ce satellite est visible depuis n’importe quel point sur Terre et met 90 minutes pour réaliser une orbite. Cette sphère restera 9 mois en orbite et sera peut-être renouvelé par la suite. Voici l’explication que donne Peter Beck à Humanity Star :

‘’Depuis des millénaires, les Hommes se sont concentrés sur leurs vies et problèmes terrestres. En tant qu’espèce, nous ne regardons les étoiles et ne comparons que rarement notre place dans l’univers à un minuscule grain de poussière dans l’immensité du tout.

L’humanité est une chose finie et nous ne serons pas là pour toujours. Pourtant face à cette insignifiance presque inconcevable, l’humanité est capable de grandes et belles choses quand nous reconnaissons que nous ne sommes qu’une même espèce, responsable de la sécurité de chacun, et de notre planète, tous ensemble. L’Etoile de l’Humanité (Humanity Star) est là pour nous rappeler tout ceci.

Peu importe où vous êtes dans le monde, riche ou pauvre, en conflit ou en paix, tout le monde pourra voir la brillante, clignotante, Etoile de l’Humanité orbiter la Terre dans le ciel de la nuit. Mon espoir est que chaque personne regardant l’Etoile de l’Humanité regardera vers le passé de l’expansion de l’Univers, ressentira en lui la connexion entre nos endroits et pensera un peu différemment à propos de leurs vies, actions et ce qui est important.

Attendez que l’Etoile de l’Humanité soit au-dessus de vous et amenez les personnes que vous aimez dehors pour la regarder et réfléchir. Vous sentirez peut-être la connexion au plus de sept milliards d’autre personnes sur cette planète avec qui nous partageons ce voyage’’ Peter Beck

 

Kickstage vu depuis le second étage

Pour ce vol, RocketLab a également pu tester leur étage supérieur (Kickstage) propulsé par un petit moteur Curie. Le but de cet étage est de pouvoir modifier l’orbite finale et ainsi larguer des satellites sur des orbites différentes malgré le fait qu’ils aient été lancés sur un même vol. Ce Kickstage permettra de faciliter la mise en place de constellation de satellites et garantira également de rendre utilisable plus rapidement les satellites lancés. Cet étage possède son propre système de contrôle, ses propres antennes, son système électrique dédié et des petits moteurs à azote pour s’orienter. Il peut porter au maximum 150kg de charge utile : masse maximale que peut envoyer Electron sur une orbite héliosynchrone. Le Kickstage a été un succès total et a pu circulariser l’orbite des satellites Lemur-2 après avoir largué le CubeSat Dove. Après sa mission, ce petit étage se désorbite pour éviter d’augmenter le nombre de débris en orbite. Cela constitue un précieux atout du lanceur Electron, qui va fréquemment faire l’objet d’envois multiples : le Kickstage devrait convaincre quelques clients !

RocketLab a donc un premier lanceur fonctionnel et déjà ouvert au commerce. Il vient de montrer au monde qu’Electron est paré à lancer les CubeSats de n’importe qui. Ce lanceur plein de nouveautés technologiques permet aussi de faire entrer la Nouvelle-Zélande dans le monde du spatiale (même si le QG de RocketLab est aux Etats-Unis) en effectuant leurs lancements depuis cet archipel. Souhaitons bonne chance à cette jeune entreprise et espérons que leurs prochains lancements seront aussi remplis de succès.

Vidéo du lancement (largage des batteries du second étage à 21:35) : https://www.youtube.com/watch?v=eg5234BOED8

Sources : RocketLab, HumanityStar

Deux lancements de fusées atypiques

samedi, janvier 20th, 2018

En cette fin de semaine, deux fusées quelques peu spéciales ont décollés. On a donc eu droit à un décollage d’un lanceur japonais Epsilon mercredi à 17h30 et le lancement d’une fusée Long March 11 vendredi à 5h25. Ces deux lanceurs ont donc envoyé un total de sept satellites.

 

Epsilon-3

 

 

Patch de la mission Epsilon-3

Comme le nom le signifie bien, ce lancement est le troisième vol d’une fusée japonaise Epsilon. Cette fusée de moins de 100 tonnes est capable de placer une charge d’1,5 tonnes en orbite basse terrestre et 590kg en orbite héliosynchrone. Ce lanceur a été mis en place pour prendre suite à la fusée M-V. Ce lanceur similaire quoi que plus puissant était en effet trop coûteux pour le japon. La JAXA (agence spatiale japonaise) a donc décidé de créer une version 50% moins chère : Epsilon était née. Cette fusée est équipée de quatre étages dont les trois premiers utilisent du carburant solide. L’avantage de ce type de carburant est son prix plus faible par rapport à un système plus complexe utilisant des carburants liquides, ainsi que sa poussée importante. Cependant une fois le moteur allumé, il est impossible de contrôler sa poussée ou de l’éteindre. Pour réduire les couts, la JAXA a décidé d’utiliser des pièces qu’elle fabrique déjà pour d’autre lanceurs. Par exemple le premier étage d’Epsilon est un booster auxiliaire de la fusée H-IIA. Un autre exemple est l’absence de stabilisation active sur le troisième étage. En général tous les lanceurs ont un système de stabilisation 3 axes qui permet de les orienter dans la direction voulue et éviter qu’ils ne dérivent. Pour stabiliser le troisième étage sans augmenter le prix, les ingénieurs ont donc installé un système qui va faire tourner l’étage sur lui-même et le garder stable par effet gyroscopique.

 

 

Le lanceur peut optionnellement intégrer un quatrième étage PBS (Post Boost Stage) qui utilise un monoergol et donc liquide. La particularité des ergols liquides est qu’ils permettent de contrôler la poussée du moteur et d’éteindre celui-ci quand on veut. Il est donc bien utile en dernier étage car il permet d’affiner l’orbite finale pour qu’elle soit la plus parfaite possible. Ce lanceur est spécial sur deux points :

 

Photo de l’ascension de la fusée Epsilon. Photo prise par l’artiste japonais Kagaya (@KAGAYA_11949 sur Twitter)

– Au décollage la fusée tourne très vite. Cette manœuvre appelée Gravity turn (que vous connaissez peut-être si vous jouez à KSP) est nécessaire pour un lancement de fusée. En effet pour se mettre en orbite, le satellite doit à la fois prendre de l’altitude mais aussi gagner de la vitesse horizontale, beaucoup de vitesse horizontale (l’ISS se déplace à 28 000 km/h par rapport au sol). Sans cette vitesse, le satellite va retomber sur Terre avant d’avoir compléter une révolution. Le Gravity turn est donc le profil de vol idéal car il combine à la perfection prise d’altitude et prise de vitesse horizontale. Cependant, sur la vidéo du lancement d’Epsilon-3 (condensé du lancement  et animation du vol) on voit la fusée effectuer cette manœuvre très tôt après le décollage.

 

– La seconde particularité de ce lanceur est la longue durée des phases balistiques. Une phase balistique est une période de temps pendant laquelle le lanceur n’est soumis qu’à une force : la gravité. Pour un lanceur cela représente les moments pendant lesquels les moteurs sont éteints. En général, une fusée ne connaît qu’une phase balistique longue qui se situe entre l’extinction du moteur du dernier étage et son rallumage pour circulariser l’orbite. Cependant, Epsilon a un profil de vol étrange sur ce point. En effet, il y a une phase balistique de près d’une minute entre l’extinction du premier étage et l’allumage du second étage. Une seconde phase balistique d’une minute et demie arrive après l’extinction du second étage. La troisième phase balistique se passe entre l’extinction du troisième étage et le premier allumage du PBS. Celle-ci dure 6min30 et est suivie d’une deuxième attente de 25min pour circulariser l’orbite avec un dernier allumage du PBS.

Malgré ses différences avec les lanceurs plus conventionnels, Epsilon a encore connu un vol réussi et continue sa lancée de sans faute. C’est donc un bon présage pour la suite de l’année 2018 de la JAXA.

 

Satellite ASNARO-2 tel qu’il sera une fois déployé en orbite.

Il va maintenant être question du satellite qu’a emporté ce lanceur : ASNARO-2. Ce satellite aura pour but d’observer la Terre avec une méthode d’imagerie radar. ASNARO, acronyme de « Satellite avancé équipé d’un nouveau système architectural d’observation », est un projet qui a pour but de développer des satellites de petites tailles (moins de 500kg) qui seraient performants tout en restant légers et peu chers. ASNARO-2 suit le satellite ASNARO qui était équipé d’un système optique pour observer notre belle planète.

 

Comparaison d’un même lieu pris en photo par ASNARO (optique) et ce à quoi cela ressemblera avec ASNARO-2 (radar)

Ce nouveau satellite utilise un système radar à synthèse d’ouverture pour cartographier la Terre. Ce principe est relativement simple. Une antenne va émettre des ondes radios pour « illuminer » une zone au sol. Ces ondes radios vont se refléter sur le sol et être captée par une seconde antenne sur le satellite (en l’occurrence la grande antenne blanche sur ASNARO-2). Pendant son déplacement, le satellite va capter la réflexion d’un même point au sol plusieurs fois et utilisant les différences entre les deux mesures, il est possible d’obtenir une cartographie topologique du sol. L’avantage d’utiliser des ondes radios est que ces dernières traversent les nuages et aussi l’eau (jusqu’à une certaine profondeur). On peut donc obtenir des images de la Terre en permanence.

 

ASNARO-2 pèse au total 570kg mais il faut savoir que 220kg sont utilisés par XSAR, le radar à synthèse d’ouverture du satellite. Ce radar développé par Mitsubishi a trois modes de fonctionnement. Le mode Spot offre une résolution de moins d’un mètre mais des images sur des bandes de 10km. Il existe ensuite le mode Stripmap qui a une résolution inférieure à 2m et une épaisseur de bandes de 12km. Le dernier mode nommé ScanSAR prend des images de résolution 16m mais mesurent près de 50km de large. Les 350kg restants du satellite forment la plate-forme. Celle-ci comprend 45kg d’ergols permettant au satellite de s’orienter ainsi que deux panneaux solaires fournissant (en fin de vie, c’est-à-dire au bout de 3 ans) un total de 1300W dont 1200 sont utilisés par XSAR. ASNARO-2 possède également une antenne parabolique qui lui permet d’envoyer des informations avec un débit de plus de 100 mo/s. Toute cette plate-forme, produite par le constructeur NEC, est très similaire à celle utilisée sur ASNARO.

ASNARO-2 a été placé sur une orbite héliosynchrone de 504km et inclinée à 97,4° par rapport à l’équateur. Cette orbite est très similaire à celle d’ASNARO mais l’heure de passage au-dessus de différents lieu est différent. Cette différence va permettre d’effectuer des observations dans des conditions différentes et, à terme, de construire une constellation observant la Terre de différentes manières. Cette formation rappellerait donc Sentinel, la flotte européenne d’observation terrestre.

 

La JAXA peut se vanter d’avoir réussi un vol parfait avec un décollage depuis la base d’Uchinoura au sud du Japon. Vous retrouverez ci-dessous une description des différents évènements du lancement ainsi qu’un magnifique timelapse du vol pris par l’artiste Kagaya :

Trajectoire du lanceur retracé au sol avec les différents évènements du vol replacé. Tous ces événements sont présentés ci-contre.

 

 

 

 

 

 

 

 

Sources : Wikipedia, SpaceFlight101, JAXA, @KAGAYA_11949

 

 

CZ-11

 

Centre spatial de Jiuquan

Cette petite fusée chinoise peut emporter environ 700kg en LEO et 380kg en SSO. Jusqu’à ce jour, seules trois Longue Marche 11 ont été lancés. Le but de cette fusée à carburant solide est de fournir à la Chine un accès d’urgence à l’espace. En effet la CZ-11 peut être prête en environ 10h pour être lancée. La Longue Marche 11 décolle tel un missile depuis un silo placé sur un camion. C’est ce qui donne à ce lanceur son côté aussi spécial. Le lieu de lancement de cette fusée est la zone de lancement de Jiuquan. Ce lanceur utilise deux étages à carburant solide ainsi qu’un étage à carburant liquide placé sous la coiffe. Tout comme Epsilon-3, ce vol était le troisième décollage d’une Longue Marche 11.

 

Satellite Jilin-1 en orbite

Ce vendredi 19 janvier 2018, à 5h25 (heure française), une Longue Marche 11 a décollé avec à son bord six satellites dont quatre CubeSats. Les deux satellites principaux du vol sont des satellites Jilin 1, en l’occurrence les numéros 7 et 8. La constellation Jilin a pour but l’observation de la Terre commerciale. La CNSA (agence spatiale chinoise) vise pas moins de 60 satellites d’ici 2020 et 138 satellites en 2030. Grâce à cette flotte, la flotte devrait obtenir des images de notre planète qui seront renouvelées très fréquemment, jusqu’à 10 minutes. Cette constellation a commencée sa fabrication en 2015 et ce lancement a envoyé deux satellites supplémentaires ce qui porte le nombre de satellites à 8. En effet, deux premiers satellites ont été lancés en 2015 par une Longue Marche 6 avec à son bord, en plus de ceux-là, deux démonstrateurs pour tester des systèmes qui pourront êtres utilisés sur de futur Jilin-1. En novembre dernier, une nouvelle CZ-6 emmena quatre satellites en plus : la constellation était commencée.

 

Satellite Xiaoxiang-2

En plus de ces deux satellites, ce sont quatre CubeSats qu’a envoyé CZ-11. Le premier se nomme Xiaoxiang 2, petit CubeSat 6U de 8kg. XX-2 (autre nom de ce satellite) est le deuxième satellite de la constellation du même nom qui vise à développer un système commercial de recherche scientifique. Le premier satellite de cette flotte avait été lancé en orbite comme passagers du second vol de Longue Marche 11. Il était équipé d’un système de caméra stabilisé pour fournir des images stables de la Terre. XX-1 a également servi d’éclaireur pour les futurs CubeSat Xiaoxiang.

 

Satellite Zhou Enlai

Le second CubeSat de ce vol ne pèse que 2kg et est en configuration 2U. Ce satellite éducationnel a été développé par une école qui a impliqué des élèves de primaire et de collège. Zhou Enlai est équipé d’une caméra HD qui prendra en photo notre planète dans un but d’éducation scientifique. Ce satellite emporte également une expérience qui vise à tester une voile pour ralentir le satellite grâce au peu d’air encore présent à cette altitude pour le désorbiter plus vite.

 

Satellite KIPP 1

Le prochain satellite nommé KIPP 1 a été développé par Kepler Communications et construit par Clyde Space. Le but de la première compagnie est de construire une constellation de CubeSat 3U pour améliorer les systèmes IoT ainsi que permettre des services de communication inter-satellites. Kepler vise une première flotte de 10 à 15 Cubesats pour peut-être arriver à 150 satellites dans le futur. KIPP-1 sert de démonstrateur technologique à la société et est équipé de panneaux solaires déployables mais aussi de 4 antennes pour communiquer et fournir un accès direct bas-débit ou alors en passant par les stations au sol haut-débit. Le second satellite KIPP devrait être lancé dans le courant de cette année par une fusée indienne : PSLV.

 

Satellite QTT 1

Le dernier satellite est un prototype de système de communication développé par l’institut de recherche Tianji. Ce CubeSat 6U emporte différents systèmes comme des outils de navigation, des antennes radio amateur, des caméras mais aussi des panneaux solaires déployables. QTT 1 est le premier satellite de ce qui pourrait plus tard devenir une grande constellation.

 

Globalement, ce vol de Longue Marche 11 est encore un succès. C’est déjà le 4ème lancement de fusées de la CNSA qui vise près de 40 vols pour l’année 2018. Sur ce vol, les six satellites ont été envoyés sur une orbite héliosynchrone de 500km d’altitude.

Intégration des satellites Jilin-1 7 et 8 sur leur lanceur

Image du lancement de la Longue Marche 11

                                                                                                              

Sources : SpaceFlight101, Wikipedia, Gunter’s Space

Double lancement chinois et indien en un jour

dimanche, janvier 14th, 2018

Cette année commence très fort avec un lancement chinois et un indien le même jour : ce n’est pas moins de 33 satellites qui ont été lancés en orbite ce vendredi 12 janvier 2018. L’agence chinoise a lancé une fusée Longue Marche 3B avec à son bord deux satellites Beidou 3 M. De son côté, l’agence indienne a mis sur orbite un total de 31 satellites avec son lanceur PSLV XL.

 

Beidou 3 M7 et M8

 

Image d’un satellite Beidou 3 M. Les couleurs ne sont là que pour aider les ingénieurs à développer le satellite.

La constellation Beidou 3 est un système de positionnement par satellites chinois. Cette constellation est cependant relativement différente du GPS ou même de Galileo. En effet ces deux derniers GNSS (Global Navigation Satellite System = Système de positionnement par satellites), le premier américain, le deuxième européen, ont tous leurs satellites sur des orbites de même altitude mais sur différents plans (6 pour le GPS et 3 pour Galileo). Ces satellites sont positionnés sur une orbite dite moyenne (MEO), d’altitude comprise entre l’orbite basse et l’orbite géosynchrone (de 2 000km à 36 000km). En l’occurrence, les satellites du GPS et de Galileo survolent la Terre à des altitudes respectives de 20 000km et 26 000km.

 

De leurs côtés, les satellites Beidou 3 sont répartis sur des orbites d’altitudes différentes en plus des différents plans. Avant de parler de manière plus approfondie de cette constellation, il est important de décrire l’histoire de la géolocalisation chinoise. Beidou 3 étant en effet la troisième phase du GNSS chinois.

 

Couverture au sol de la constellation Beidou 1 après la mise en place du troisième satellite en 2003

Beidou 1 fut la toute première constellation de cette famille. Elle était composée de quatre satellites lancés en orbite géostationnaire au-dessus de la Chine. Cela signifie que les satellites avaient une période orbitale de pile une journée : ils resteront donc toujours au-dessus de la Chine. Les satellites Beidou 1 ont été lancés en orbite de 2000 à 2007. Tous ces satellites sont aujourd’hui hors service (depuis 2009 pour le quatrième, 2011 pour le premier et le deuxième et 2012 pour le troisième).

 

 

Couverture au sol de la constellation Beidou 2 en 2012

De 2009 à 2012, l’agence spatiale chinoise (CNSA) a mis en place la constellation Beidou 2. Cette constellation avait pour but d’étendre légèrement la couverture de fonctionnement. Cette seconde famille comprenait cinq satellites géostationnaires au-dessus de la Chine, cinq satellites en orbite géosynchrone (orbite similaire à celle géostationnaire mais dont l’inclinaison peut ne pas être nulle) et enfin cinq satellites en MEO. En plus d’augmenter la couverture (voir ci-contre), la précision du GNSS est devenue plus accrue : elle est passée de 30m à moins de 10m. En plus de ces quinze satellites, la CNSA avait lancé un satellite expérimental en MEO en 2007 et un premier satellite géostationnaire qui s’est avéré défectueux en 2009.

 

 

Positionnement des 35 satellites de la constellation Beidou 3 en orbite

A partir de 2015, la CNSA a commencé l’envoi des premiers satellites de la dernière constellation de la famille : Beidou 3. Cette nouvelle et dernière formation de sondes aura pour objectif de transformer Beidou en une nouvelle forme de GNSS. En effet jusqu’à Beidou 2, la constellation ne permettait d’obtenir une position que sur une partie réduite de la Terre. Beidou 3 va permettre à la Chine de devenir indépendante de toute autre nation sur un point de vue géolocalisation dans le monde entier. Pour permettre cette globalité, la CNSA compte envoyer pas moins de 35 satellites en orbite. Ces satellites seront répartis sur différentes altitudes : 27 survoleront la Terre à une altitude de 21 500km et seront distribués sur 3 plans inclinés à 55°. En plus, 5 satellites seront positionnés en orbite géostationnaire de manière à former un pentagone régulier et 3 satellites seront en orbite géosynchrone inclinée à 55° et répartis sur 3 plans. Ce nouveau GNSS global aura une précision de moins de 10m sur la ligne publique et de près de 10cm sur la ligne cryptée (surtout utilisée pour les opérations gouvernementales et militaires).

 

 

Photo prise depuis le sol du lanceur Longue Marche 3B pendant son ascension

Le vendredi 12 janvier 2018 à 00h18 (heure française), deux nouveaux satellites de cette constellation ont donc décollé depuis le centre spatial de Xichang. C’est une fusée Longue Marche 3B qui a envoyé les satellites M7 et M8 sur leur orbite. Comme leur nom en « M » l’indique bien, ces deux satellites font partis de la famille des satellites en orbite moyenne. Le lancement a été un succès total, a annoncé la CNSA. Ce lancement chinois annonce une très bonne année en plus du lancement du mardi 9 et du samedi 13. L’agence chinoise prévoit de lancer pas moins de 40 fusées sur l’année 2018 ce qui placerait la Chine n°1 en terme de nombre de décollages de fusées.

 

PSLV C40

 

Décollage de la mission PSLV C40

Un peu plus tard dans la journée, une fusée indienne décollait avec à son bord un nombre de satellites très impressionnant au regard des lancements américains ou européens. En effet l’ISRO (Agence spatiale indienne) a envoyée pas moins de 31 satellites à bord d’un lanceur PSLV-XL (Polar Satellite Launch Vehicle). Ce nombre peut sembler très impressionnant mais les indiens sont devenus les spécialistes du lancement d’un grand nombre de passagers. En effet, il est important de rappeler que cette même fusée avait lancé près de 104 satellites l’année dernière, un record ! Cependant, tous ces passagers ne sont pas des satellites aussi imposants que des Beidou M. La flotte envoyée est souvent composée d’un ou deux satellites moyens (environ 500kg) et de nombreux CubeSats (satellites composés d’un ou plusieurs cubes de 10cm et ne pesant pas plus de 50kg).

 

 

 

 

Nous vous proposons maintenant de décrire tous les satellites de cette flotte, petit ou grand, qui ont décollé à bord de la mission PSLV C40, afin d’avoir un regard précis sur cet envoi aux multiples facettes :

Cartosat 2F : Ce satellite est, comme son nom l’indique, issu de la deuxième génération des satellite Cartosat, il représente la 7ème unité envoyée. Cette famille de satellites est indienne et a pour but de cartographier la Terre en haute définition. Cartosat 2F est une copie quasi exacte des satellites 2C, 2D et 2E avec les mêmes instruments. Cette constellation de seconde génération a été inaugurée en 2007 avec le satellite 2A ayant été lancé par une autre fusée PSLV. Ce satellite hexagonal mesure 2,5 mètres de haut et 2,4 mètres de diamètre et pèse approximativement 710kg. Grâce à ses 4 roues à réactions et ses 8 moteurs de contrôle d’attitude (les fameux RCS pour les connaisseurs de KSP), le satellite peut atteindre une précision de +/- 0,05° en pointant le sol. Cette précision est très importante pour obtenir des photographies précises du sol.

Cartosat 2F

Telesat Phase-1 LEO : également nommé LEO Vantage 1, c’est un prototype de satellite de télécommunication dirigé par TeleSat Canada. Cette unité aura pour but de démontrer la capacité de leur technologie à communiquer en haut débit en utilisant des ondes Ka depuis une orbite basse (d’où le LEO dans le nom du satellite qui signifie orbite basse terrestre). Ce satellite établira donc la preuve du concept pour, à terme, installer une constellation en orbite basse. L’intérêt d’un tel système qui se trouve habituellement en orbite géostationnaire est de réduire la latence : les satellites sont plus proches donc les informations font le voyage en moins de temps. En moyenne les systèmes en GEO (orbite géostationnaire) ont une latence de 250ms et O3b, un autre opérateur utilisant des satellites en MEO, attend une latence de moins de 150ms. En utilisant des satellites en LEO, la latence pourrait descendre vers les 5ms mais le nombre de satellites devra être plus important car ces satellites peuvent communiquer avec le sol sur une plus petite surface. Un premier satellite avait été envoyé en novembre dernier par un Soyuz 2.1b mais un problème de configuration du plan de vol du dernier étage Fregat a résulté en un échec de la mise en orbite et un retour destructeur sur Terre pour les satellites. Celui qui vient d’être lancé est bien plus petit et plus léger que le premier (65 x 65 x 72cm et 100kg). L’agence canadienne a eu plus de chance sur ce second vol et va maintenant pouvoir commencer les tests !

Telesat LEO Phase 1

MicroSat-TD : Ce microsatellite développé par l’ISRO va permettre d’observer la Terre en noir et blanc, en couleur et dans l’infrarouge proche. Ce petit satellite de 120 kg va réaliser ses observations sur une orbite anormalement basse pour un satellite non-CubeSat : 359km (plus bas que l’ISS !). Cette orbite basse va permettre des photos de meilleure résolution car le satellite sera moins loin de la Terre mais MicroSat-TD devra effectuer régulièrement des allumages de moteurs pour éviter de descendre trop bas et brûler dans l’atmosphère plus dense. L’Inde n’est cependant pas la première nation à envoyer un satellite sur une orbite si basse. La Chine avait envoyé Kuaizhou-1 sur une orbite de 295km en 2015 et le Japon a envoyé SLATS à 250km en fin 2017.

MicroSat-TD

 

INS-1C : INS-1C est la troisième unité d’une série de nanosatellites développés par l’ISRO. Ces satellites sont conçus pour contenir différentes petites expériences pour un vol de courte durée dans les conditions extrêmes de l’espace. INS-1C mesure 24,5 x 22,7 x 21,7cm et pèse seulement 11kg. Il est équipé de deux petits panneaux solaires déployables qui vont permettre de l’alimenter lui et ses expériences en électricité pendant tout leur séjour dans l’espace. En parlant de passagers, l’expérience qu’a emportée INS-1C est un démonstrateur technologique d’une caméra multispectrale miniature. Cette caméra nommée MMX-TD a été développé par le Centre des applications spatiales (SAC), agence indienne qui développé des instruments scientifiques pour l’ISRO.

INS-1C

 

ICEYE POC-1 : ICEYE est la première constellation de microsatellites au monde à cartographier la Terre entière en temps réel en imagerie radar. Cette constellation opérée par la compagnie finlandaise du même nom permet, grâce à l’imagerie radar, d’observer le sol terrestre que ce soit de jour comme de nuit, qu’il y ait des nuages ou non. Un autre avantage du radar est sa capacité à définir la topographie du sol. La masse de ces satellites est de 61kg et l’antenne radar, une fois déployée, mesure 3,2m d’envergure. ICEYE a également conclu un contrat pour 21 lancements de fusée Vector-R (fusée d’une start-up du même nom qui commence à faire voler des fusées dont l’objectif est la mise en orbite de microsatellite). Ce satellite est le premier prototype de l’agence finnoise qui a pour but d’en envoyer trois en 2018 pour vérifier leur concept.

ICEYE POC-1

 

Carbonite-2 : Ce microsatellite développé par Surrey Satellite Technology Ltd (SSTL) est un démonstrateur technologique qui servira de base à la constellation Earth-i. Cette constellation, qui devrait être opérationnelle en 2019, offrira des vidéos hautes résolutions de notre belle planète. Le premier satellite Carbonite a été lancé à bord d’une autre fusée PSLV en juin 2015 sous un secret le plus total : il était nommé CBNT-1 et la seule information connue était son caractère expérimental. Le petit satellite britannique possède un télescope de 25cm pour imager la Terre avec une résolution de 1,5m. Earth-i a commandé à SSTL les cinq premiers satellites de la constellation pour novembre 2017 pour les lancer sur un même vol en 2019 et ainsi commencer pleinement la construction de cette constellation.

Carbonite-2

Arkyd-6 : Arkyd-6 est le deuxième satellite de test de Planetary Ressources. L’objectif de la compagnie est de développer des outils pour explorer de potentielles ressources dans des astéroïdes et développer les technologies nécessaires à leur minage. La compagnie a décidé d’installer dans un premier temps des petits satellites en orbite terrestre pour vérifier leur technologie et plus tard envoyer de véritables télescopes spatiaux pour effectuer de plus amples analyses. En 2013, Planetary Ressources recueille 1,5 millions de dollars pour financer leur satellite Arkyd-100. Ce financement est dû en partie au service « Selfie dans l’espace » qui consistait à afficher une image des supporters sur un petit écran et prendre cet écran en photo avec la Terre en fond. Arkyd-6 va tester les nouveaux systèmes et les nouveaux capteurs qui seront utilisés sur de prochains satellites. La charge utile du satellite est une caméra infrarouge qui permettra plus tard de détecter la présence d’eau et de créer une carte thermique des astéroïdes.

Arkyd-6

PicSat : Cocorico ! Le petit satellite français de la liste, PicSat, est un CubeSat 3U (3 cubes de 10cm de côtés les uns sur les autres) développé par le Laboratoire d’Etudes Spatiales et d’Instrumentation en Astrophysique (LESIA), l’Observatoire de Paris et trois universités. Ce petit satellite a une mission qui peut sembler assez complexe aux premiers abords : Analyser le transit de l’exoplanète Beta Pictoris b devant son étoile avec un télescope pas plus puissant que la lunette de Galilée. Ce défi technologique permettrait de réaliser un bond de géant dans la miniaturisation et autoriserait plus facilement l’étude des exoplanètes (moins cher, moins complexe, moins gros). Pour s’orienter précisément vers cette planète, PicSat utilise trois roues à réaction ainsi que trois magnéto-coupleurs. Ces trois derniers sont des électro-aimants qui s’alignent avec le champ magnétique terrestre quand ils sont activés. Notre petit satellite de seulement 4kg était d’ailleurs très content d’arriver dans l’espace et a pu communiquer avec l’Observatoire de Paris très peu de temps après sa mise en orbite. Si vous désirez pour plus d’infos pendant sa mission, allez voir le compte @IamPicSat sur Twitter.

PicSat

Corvus-BC 3 : Corvus-BC 3 est le 3ème CubeSat 6U (10 x 20 x 30cm) de la constellation Landmapper-BC. Cette constellation, dirigée par Astro Digital, va observer la Terre en haute résolution pour générer des données à but commercial et scientifique. Cette flotte sera constituée de dix satellites identiques à celui-ci mais vingt autres, dans une configuration HD, seront ajoutés pour obtenir des images de la Terre entière d’une résolution moyenne tous les jours et d’une résolution de 2,5m tous les trois ou quatre jours. Corvus-BC possède trois caméras dans trois domaines différents : une dans l’infrarouge proche, une dans le rouge et une dernière dans le vert. Ce satellite de 11kg possède également une antenne en bande Ka qui peut émettre un faisceau de 10,6° ce qui nécessite une précision assez importante pour l’envoi des données. Chaque jour, Corvus B capturera 1,2 TB de données. Avec la configuration HD, cette capacité passera à 15TB par jour grâce à une antenne plus efficace. 15TB équivaut à 25 millions de km² par jour : pour vous donner un ordre d’idée, c’est comme si ces satellites faisaient une carte de la Russie et des Etats-Unis en un jour.

Corvus-BC 3

CICERO-7 : Ce CubeSat 6U fait partie de la constellation du même nom et en est le 7ème membre. CICERO sera composé de plus de 24 satellites qui effectueront des mesures sur l’atmosphère terrestre et l’étude de la surface au travers de la réflexion des signaux GPS et Galileo. Cette constellation est opérée par GeoOptics Inc. et l’entreprise Tyvak Nano-Satellite Systems Inc. agit comme l’entrepreneur principal. Le principe de fonctionnement de ce satellite est assez basique : les satellites CICERO vont recevoir un signal direct des satellites GPS et quelques fractions de secondes plus tard un signal qui aura rebondit sur la surface et même potentiellement des signaux qui auront été déviés par l’atmosphère. En utilisant tous ces différents signaux, il est possible d’obtenir des informations sur les propriétés du sol et de l’atmosphère. Comme la plupart des CubeSats 6U, CICERO-7 pèse une dizaine de kilogrammes.

CICERO

CANYVAL-X 1&2 : CANYVAL-X est un CubeSat en deux parties développé par le centre Goddard de la NASA, l’institut de recherche aérospatiale de Corée et l’Université Yonsei de Corée. Ces deux CubeSats ont pour but de démontrer un système d’alignement parfait entre deux satellites qui pourrait permettre de créer un télescope spatial virtuel avec une distance focale très longue. Cette longue distance focale permettrait des avancées très significatives dans le domaine de l’astrophysique. La mission CANYVAL-X est constitué d’un CubeSat 2U nommé Tom et d’un CubeSat 1U nommé Jerry. Ces noms sont en référence au dessin-animé américain Tom et Jerry avec le chat Tom chassant en permanence la souris Jerry. Lors du lancement, les deux CubeSats étaient attachés l’un à l’autre et ne sont séparés qu’une fois libres dans l’espace. Tom et Jerry peuvent aussi servir d’observateurs du Soleil avec un satellite qui occulte notre étoile tandis que le second regarde la couronne solaire ou de potentielles comètes.

CANYVAL-X

 CNUSail-1 : CNUSail-1 est un satellite qui se trouve sous la forme d’un CubeSat 3U mais qui une fois dans l’espace fera près de 2m. Comment est-ce possible ? Ce satellite est en fait un prototype de voile solaire. Cette voile fonctionne sur le même principe qu’une voile conventionnelle sur Terre sauf qu’ici au lieu d’utiliser le vent classique on utilise le vent solaire (particules à haute énergie éjectées par le Soleil). Les voiles solaires pourraient servir de système de propulsion passive pour des petits satellites. Elles pourraient permettre de les placer sur une orbite plus haute ou inversement à les freiner et les faire rentrer dans l’atmosphère une fois leur mission finie. Au total ce satellite ne pèse pas plus de 4kg et la toile ne mesure que 0,25µm d’épaisseur (0,25 millièmes de millimètres).

CNUSail 1

KAUSAT-5 : Ce petit CubeSat 3U développé par l’université d’aviation coréenne a pour objectifs primaires l’observation de la Terre dans les infrarouges proches et la mesure des radiations reçues en orbite basse terrestre. Ce satellite sert aussi de test sur terrain aux composants fabriqués par le laboratoire de recherche en systèmes spatiaux. KAUSAT-5 déploiera ses quatre panneaux solaires dans l’espace. Il comporte également un bouclier solaire pour protéger la caméra infrarouge ainsi qu’un compteur Geiger pour mesurer les radiations en orbite.

KAUSAT-5

SIGMA : SIGMA est un CubeSat 3U sud-coréen développé par l’Université Kyung Hee qui a pour mission d’étudier le champ magnétique global de la Terre et les radiations reçues. Cependant, l’étude magnétique est classée comme secondaire et c’est l’étude des radiations en LEO qui sera prioritaire. Cette étude se réalise en mesurant le spectre de transfert d’énergie linéaire (LET) et en calculant ensuite l’équivalent radioactif sur un humain en orbite. La chambre de mesure de ce spectre se trouve en haut du satellite (voir image ci-contre).  Le magnétomètre, de son côté, se trouve sur un long bras déployable pour pouvoir le placer le plus long possible du magnétisme créé par le satellite lui-même. Ce principe de bras est utilisé sur toutes les sondes possédant un magnétomètre pour éviter de brouiller le signal : Cassini en avait un par exemple.

SIGMA

STEP Cube Lab : Ce Cubesat 1U (10 x 10 x 10cm) développé par l’Université Chosun en Corée du Sud est montré comme un démonstrateur technologique fondamental. Son but est de tester différents systèmes permettant de sauver un petit satellite qui n’aurait pas encore effectuer sa mission principale mais qui aurait eu un problème. Il y a cinq mécanismes qui seront testés par STEP. Le premier est le système MEMS qui consiste en un propulseur à poudre comme les boosters de fusée mais qui, grâce à sa composition, s’éteindra dès lors que l’allumeur électrique sera éteint. Ce propulseur permettrait à des satellites d’ajuster leur orbite si cette dernière n’était pas celle désirée. Il y a ensuite des radiateurs à émittance variable. Ces radiateurs constituent un mécanisme développé il y a peu pour contrôler la température d’un petit satellite qui n’a pas la place d’intégrer un plus gros système de gestion thermique. Un autre système testé par STEP sera une technologie d’urgence dans le cadre du contrôle thermique du CubeSat. Cette expérience aura pour but de faire passer les fluides de refroidissement avec un écoulement oscillatoire dans les tubes pour éviter de dégrader ceux-ci trop vites comme l’ont montré des tests au sol. La quatrième expérience, nommée CPV, est un système qui a pour but de générer de l’électricité de manière compacte en concentrant les rayons de notre étoile sur un petit panneau solaire. La dernière expérience va viser à démontrer un système de déploiement d’éléments du satellite. En effet, les CubeSats sont petits et doivent donc souvent déployer leurs expériences et panneaux solaires. Ce nouveau mécanisme fonctionne avec un fil en nylon qui retiendrai l’expérience une fois larguée par un ressort.

STEP Cube Lab

Fox 1D : Fox 1D est un Cubesat 1U développé par AMSAT pour effectuer des tests de technologies et des radios amateurs dans l’espace. Ce satellite, troisième de la famille à prendre son envol, emporte en son sein trois expériences développées par le département de physique et d’astronomie de l’Université d’Iowa, par Virginia Tech et par l’école américaine Pennsylvania State-Erie. Ses trois charges utiles sont : un capteur de radiation pour effectuer une carte de celles-ci en orbite basse ; un prototype de caméra de Virginia Tech ; une expérience sur les gyroscopes électroniques. La charge utile principale, celle installée par AMSAT, est une grande antenne qui permettra aux amateurs radio de tester leurs systèmes au sol en communiquant avec Fox 1D.

Fox 1D

Flock-3p’ : Il y avait quatre de ces satellites à bord du lanceur PSLV ce vendredi. Ces derniers rejoindront la famille Dove, constellation déployée par la compagnie californienne Planet. L’objectif de cette entreprise est d’imager la Terre rapidement à des fins commerciales. Certains satellites Dove ont été lancés lors d’autres lancements à partir de 2013 tandis que d’autres satellites ont eu la chance d’être larguée depuis l’ISS et ont donc obtenu leur photo souvenir comme celle-ci-contre. Avant 3p’, la société Planet a envoyé un total de 315 satellites opérationnels. Vous vous souvenez du largage de 104 satellites en un lancement de PSLV ? Et bien dans cette centaine de satellites, il y avait près de 88 Flock-3p. Les satellites Flock-3p’ pèsent environ 5kg et sont sous la forme de CubeSats 3U. Ils sont équipés d’imageurs télescopiques pouvant effectuer des images en noir et blanc, couleur et dans l’infrarouge proche avec une résolution au sol de 3 mètres. Les satellites Doves évoluent en permanence et même au sein d’un lancement commun, tous les satellites ne sont pas forcément identiques.

Flock-3p’

Lemur-2 : La compagnie Spire a construit quatre satellites Lemur-2 pour ce vol. Ces nouveaux arrivants permettront d’agrandir leur constellation de mesure de l’atmosphère pour améliorer les prévisions météos ainsi que le trafic maritime. Lemur-2 a été inauguré en 2015 avec quatre premiers satellites lancés par un PSLV et elle compte aujourd’hui 59 CubeSats 3U fonctionnels. En effet, en plus de ces 59 satellites, 12 ont rencontré des problèmes : deux n’ont pas réussi à se déployer en orbite et dix autres ont été perdus lors de l’échec du lancement de Soyuz de novembre 2017. Les Lemur-2 sont donc largués par des fusées indiennes PSLV et des Soyuz russes mais aussi par des cargos américains Cygnus après que ces derniers aient ravitaillé l’ISS. Les deux charges utiles de Lemur-2 sont SENSE et STRATOS. Le premier est dédié au trafic maritime et le monitore en servant de relais entre les bateaux en mer et les stations au sol. De son côté, STRATOS étudie l’atmosphère en mesurant l’occultation des signaux GPS. Suivant comment Lemur-2 reçoit le signal de tel satellite GPS, il pourra calculer la température, la pression et l’humidité de l’atmosphère à telles ou telles altitudes.

Lemur 2

DemoSat-2 : Ce satellite dont ne nous savons pas grand-chose est un CubeSat 3U américain qui va tester un système de radio UHF. Nous ne connaissons malheureusement pas l’opérateur de ce satellite.

Demosat-2

MicroMas-2 : MicroMas-2 est le raccourci pour Microsatellite pour l’étude des micro-ondes atmosphériques. Ce satellite américain est un CubeSat 3U équipé d’un radiomètre et est la suite logique au satellite MicroMas-1 qui avait démontré le bon fonctionnement des systèmes internes du satellite mais qui n’avait pas pu obtenir de données à cause d’un problème de transmetteur. Ce projet est sous le contrôle du MIT/LL (Institut de Technologie du Massachussetts / Laboratoire Lincoln), du MIT/SSL (Laboratoire des systèmes spatiaux) et de l’Université de Amherst et sous le financement de l’US Air Force et de la NOAA (Administration atmosphérique et océanique nationale). La charge utile principale de MicroMas-2 est un radiomètre qui va effectuer des mesures de l’atmosphère telles que la température et l’humidité.

MicroMAS-2

Tyvak-61C : Ce démonstrateur technologie développé par la compagnie californienne Tyvak Nano Satellite Systems a une mission d’astronomie à effectuer en orbite. Son objectif principal va être de cataloguer la variabilité des étoiles lumineuses. Ce CubeSat 3U est basé sur la famille de satellite de la compagnie : Endeavour. Il est équipé de quatre panneaux solaires ainsi que de traqueurs stellaires pour déterminer son orientation une fois dans l’espace et de trois roues à réaction et trois magnéto-coupleurs pour s’orienter.

Tyvak 61C

SpaceBEE : La mission PSLV C40 a mis sur orbite une flotte de quatre satellites SpaceBEE. Ces CubeSats 0,25U (10 x 10 x 2,5cm) sont des démonstrateurs technologiques qui vont tester des communications réciproques entres satellites et un système de relais d’informations utilisant des nano satellites. Si ce système est prouvé, il pourrait mener à des constellations de satellites minuscules qui nous fourniraient un accès Internet dans le monde entier. Chaque SpaceBEE a sa propre pair d’antennes VHF/UHF qu’il déploie une fois en orbite.

SpaceBEE

Evènements principaux du vol PSLV C40

La mission PSLV C40 est un succès total pour l’agence spatiale indienne ! Cela montre au monde entier que l’Inde est de retour dans l’aventure spatiale même si elle a connu un échec en fin d’année dernière. Souhaitons tous bonne chance aux différents satellites qui sont maintenant seuls dans le vide de l’espace.

Tracé au sol de la trajectoire du lanceur PSLV C40

 

 

Sources : ISRO, Wikipedia, NasaSpaceflight, Spaceflight101, CNSA

Zuma, le lancement secret maintes fois repoussé

lundi, janvier 8th, 2018

Patch officiel de la mission Zuma

C’est donc SpaceX qui ouvre le bal des lancements de l’année 2018 avec un vol d’une nouvelle Falcon 9. Ce lanceur a décollé le 8 janvier à 2h00 (heure française) avec à son bord… Zuma ! Ce satellite quelque peu spécial a été mis en orbite avec succès par la compagnie américaine privée.

Zuma est un satellite très secret : on ne sait vraiment rien de lui contrairement à d’autres lancements secrets comme les missions NROL ou X-37B qui laissent percer quelques informations. En effet, l’office national de reconnaissance américain (NRO) communique un minimum sur leurs satellites en donnant un numéro de mission comme pour NROL-42 ou NROL-76 (ce dernier a d’ailleurs été lancé par SpaceX, à la mi-2017), ce qui nous permet de légitimement douter du fait que Zuma ait été commandé par la NRO. Et effectivement, nous n’avons même pas connaissance de l’origine de cette commande : le seul point qui échappe au mystère est le constructeur du satellite, Northrop Grumann. Vous pouvez d’ailleurs voir sur les images ci-contre et ci-dessous que seul ce nom d’entreprise apparait sur la coiffe.

 

 

Falcon 9 sur le pas de tir 39A en novembre

Northrop Grumann est une compagnie américaine qui produit des satellites mais aussi des missiles et des avions militaires pour le compte de l’US Air Force. C’est donc cette agence qui a fabriqué Zuma et s’est chargé d’acheter le vol sur Falcon 9. Cependant, la grande inconnue reste donc l’entreprise qui profitera de ce satellite. Il est possible voire probable que ce satellite soit chargé de sécurité gouvernementale.L’autre point connu de la mission, c’est son orbite finale. On sait que le satellite a été lancé sur une orbite dite basse, c’est-à-dire qu’il évolue à une altitude moyenne d’environ 1 900km.

 

 

Son orbite est également inclinée à environ 50° par rapport au plan équatorial. Cette inclinaison n’est pas sans rappeler celle de la Station Spatiale Internationale mais les similarités s’arrêtent là, cette dernière n’étant située qu’à 400km d’altitude. On sait également que cette orbite n’a pas à être parfaite. En effet la fenêtre de tir de la Falcon 9 durait deux heures (de 1h00 à 3h00). Cette fenêtre de tir longue contraste avec des fenêtres de tir pour d’autres vols comme celui du cargo Dragon CRS-13 pour lequel la fenêtre ne dépassait pas la seconde.

 

Falcon 9 sur le pas de tir 40 en janvier

En parlant de temps, le vol du satellite Zuma a été de très nombreuses fois repoussé. Il aurait dû décoller le 16 novembre 2017 du pas de tir 39A de Cape Canaveral. Malheureusement, des vents en altitude sont détectés et le vol est repoussé de 24h. Le lendemain, c’est la coiffe qui a un problème : une des valeurs de télémétrie n’est pas bonne. Nouvelle échéance ! Le 18, le problème n’était toujours pas résolu et SpaceX annonce un report jusqu’à nouvel ordre et dans la journée, le lanceur est ramené au hangar. Petit fait amusant, SpaceX n’avait jamais lancé de fusées pendant un mois de novembre et celle-ci aurait dû être la première : vous l’avez deviné, la malédiction se perpétue et à ce jour, aucune Falcon 9 n’a donc décollé pendant un mois de novembre.

 

 

Le report a donc fait glisser le lancement jusqu’à début janvier et c’est donc le 3 que l’on voit le booster sortir du hangar. Seul le premier étage du lanceur est sorti pour aller sur le pas de tir SLC-40. Ce pas de tir avait été remis en service pendant cette longue phase d’attente, suite à l’accident d’un Static Fire pour le moins explosif, et n’a connu avant ce lancement qu’un seul vol : celui du cargo CRS-13. Ce 3 janvier, le booster a effectué un test WDR qui consiste à remplir le booster en carburant pour vérifier l’intégrité de l’étage, le Static Fire de ce lancement ayant déjà été réalisé en Novembre, pendant la première campagne de tir. Un autre test de remplissage fut requis deux jours plus tard suite au report du 6 au 7 janvier, à cause de nouveaux vents en altitude, pour finalement s’envoler le 8 janvier 2018.

Comme tous les vols de fusée, une aire est réservée au lancement pour éviter que des avions et des bateaux ne soient dans cette zone et ne risque de recevoir un débris. Ceci est la zone restreinte pour Zuma

 

Pendant le live, nous n’avons eu des informations que du premier étage ce qui est logique pour un vol secret qui ne laisse fuiter que les informations non capitales ou facile à déterminer par ailleurs. Après avoir propulsé le second étage et la coiffe, le booster est revenu se poser à Cape Canaveral sur la zone LZ-1. Ce retour s’est effectué en 3 étapes principales : juste après la séparation du second étage, le booster s’est retourné et a allumé trois de ses neufs moteurs pour modifier sa trajectoire et revenir à la LZ-1. Quelques minutes après (comme vous pouvez le voir sur la timeline ci-dessous), l’étage procède à un nouvel allumage pour se ralentir et éviter de trop chauffer pendant la rentrée. Finalement, un seul moteur est rallumé pour effectuer le freinage final et atterrir en douceur. Ces trois allumages se nomment respectivement : Boostback burn, Entry burn et Landing burn.

 

 

 

Voici maintenant la timeline du lancement avec tous les évènements importants avant et pendant le vol :

 

SpaceX a annoncé que le vol était un succès et le premier étage a été récupéré sans souci ! Ce vol annonce une bonne année 2018 pour le spatial !

 

Photos du lancement :

Décollage de la mission Zuma

Photo prise au Max-Q, c’est-à-dire au moment auquel la pression de l’air est la plus importante sur le lanceur

Juste avant l’extinction du premier étage et la séparation du second étage

Boostback burn vu depuis le premier étage. On voit d’ailleurs le second étage au fond

Entry burn vu depuis le premier étage. On voit d’ailleurs les grid fins (les petites grilles à gauche des flammes) qui se sont déployées entre le boostback burn et l’entry burn

Extinction de l’entry burn vu depuis le sol. On voit bien que seuls trois moteurs s’étaient allumés

Atterrissage du premier étage vu depuis celui-ci !

Photo avec une exposition de 8 minutes qui permet de voir les différents allumages de moteurs

Sources : SpaceX, SpaceFlight Now